Sixième Dimanche du T.O., Année B

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Lev 13, 1-46; 1 Cor 10, 31- 11, 1; Mc 1, 40-45.
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Saint Marc nous propose deux manières de lire et d’interpréter le miracle de la guérison du lépreux. La première lecture possible part du lépreux lui-même, de sa souffrance, de son désir de guérison. Sa prière touche le coeur de Jésus dont la parole le purifie. On imagine alors facilement la délivrance, le soulagement, l’explosion de joie de celui qui avait vécu un véritable calvaire personnel et social. Et qu’importe, pour lui, ce que les autres penseront de son enthousiasme, de ses cris de joie, qu’importe s’il n’obéit pas à Jésus et le met en difficulté !
Et puis il y a une seconde lecture, qui nous est suggérée par Saint Marc lui-même. La sévérité de Jésus contraste avec la joie exubérante du lépreux. Il y a, de la part de Jésus, comme une tentative de minimiser le miracle, de se dérober aux conséquences de cette guérison. Jésus ne regrette pas le bien qu’il a fait au lépreux, mais il semble en craindre les conséquences. Il ne veut pas de cette renommée facile, qui risque de l’empêcher de continuer sa mission, en rendant sa parole inaudible.
Car ce qui va maintenant attirer les foules autour de lui, ce n’est plus la Parole, dans son austère simplicité, cette annonce de la Bonne Nouvelle et du Royaume de Dieu, mais plutôt la soif de signes, de miracles et de merveilleux. Quand on lit Saint Marc, on a l’impression que Jésus est pris à son propre piège: pris entre sa tendresse pour tous ceux qui souffrent d’une part, et sa mission d’annoncer le Royaume d’autre part.
Et la suite du passage, que nous venons d’entendre, nous permet de mieux saisir ce qui va se passer. Désormais, pour pouvoir annoncer la Parole, Jésus doit se retirer, éviter les lieux habités, renoncer à aller vers les villes, car les foules se sont mises en marche pour venir à sa rencontre. Tous ceux qui viennent à Jésus se mettent en route avec leur lot de souffrances et de misères, leur poids de solitude et d’amertume, leurs échecs mais aussi leurs espérances. Dans ces foules qui se mettent en marche vers le désert, il y a toutes les souffrances, mais aussi toutes les attentes et les désirs des hommes.
En guérissant les corps, en guérissant notre lèpre, Jésus a également touché nos coeurs, et réveillé nos âmes, il a provoqué une immense espérance qui dépasse les limites de cette vie. Il a réveillé cette attente sourde et silencieuse qui gît au plus profond du coeur des hommes de tous les temps, cette attente qui s’ignore et qui sommeille au plus profond de nous, mais qu’un geste, un mot, un regard, peuvent brusquement réveiller.
Aujourd’hui encore, des foules apparemment indifférentes et lointaines, perdues dans le tourbillon du divertissement et du bruit, peuvent de nouveau se réveiller et s’ouvrir au miracle de la Parole de Dieu. Nous avons tous à l’esprit ces hommes et ces femmes qui, par leur vie, ont attiré l’attention des foules pour la tourner vers Dieu. Que ce soit Mère Teresa, Jean-Paul II ou Soeur Emmanuelle, ils ont su toucher ce qu’il y avait de meilleur en nous, ce qu’il y avait de plus secret, de plus authentique, de plus pur.
A travers les saints et les saintes de tous les temps, à travers tous ces hommes et ces femmes qui tissent la trame de Son Eglise, Dieu continue à nous réveiller, à nous attirer vers Lui. En eux, c’est Jésus qui est toujours présent au milieu de nous, comme Il l’a promis après Sa Résurrection, et qui travaille dans l’ombre de nos déserts et de nos solitudes. A travers eux, Dieu vient parler à notre coeur pour nous conduire au désert et nous inviter à la conversion, nous inviter à la joie de retourner vers la maison du Père.
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