Saints Robert, Albéric et Etienne

Les Saints Fondateurs de Cîteaux

Nous célébrons aujourd’hui les trois abbés fondateurs de l’Abbaye de Cîteaux.  Chacun à sa manière a mis sa pierre à l’édifice pour que l’Ordre Cistercien soit ce qu’il est devenu, avec son rayonnement jusqu’à aujourd’hui.  Chacun des trois donna une couleur particulière à l’édifice. 

Robert avec quitté Molesmes pour s’installer dans un lieu retiré, où il souhaitait vivre de manière plus conforme à ce que Saint Benoît enseigne dans sa Règle.  Le travail manuel était remis à l’honneur, alors qu’à l’époque nombre de monastères vivaient des revenus du travail d’autrui.  Robert souhaitait également rompre l’habitude que les seigneurs locaux viennent en grande pompe investir les monastères pour leurs réunions mondaines. 

Albéric eut pour première tâche de fixer la communauté sur le lieu, en remplaçant les cabanes par un monastère en dur.  Les anciens ermites de Molesmes devinrent dès lors des moines cénobites, pour qui la Règle de Saint Benoît avait été écrite.   Mais les vocations restaient rares, car le Nouveau Monastère avait une telle réputation d’austérité que personne n’envisageait d’y entrer. 

Étienne succéda à Albéric et, grâce à un long abbatiat, put mettre sur pied l’organisation juridique, canonique et liturgique.  Dès avant d’être abbé il avait rétabli le chant grégorien selon la tradition de Saint Ambroise de Milan, et simplifié l’office pour respecter davantage ce que Saint Benoît nous enseigne dans sa Règle.  Selon le Grand Exorde, Saint Étienne, brûlait d’une fidélité jalouse et d’un amour ardent pour la vie monastique, la pauvreté et la discipline régulière.  C’est cet amour qui donna vie à la communauté de Cîteaux.   On peut imaginer que c’est cette coloration particulière d’Étienne qui modifia la manière de penser des contemporains vis-à-vis du « Nouveau Monastère ».  Les vocations commencèrent à entrer, ce qui permit de prévoir des fondations dans l’esprit de Cîteaux.  C’est pourquoi, sous l’inspiration d’Étienne, la Charte de Charité fut rédigée pour définir le lien qui doit unir toutes les communautés vivant la même spiritualité.

C’est dans cet environnement apaisé et dans une vraie « école de l’amour du Seigneur » que les vocations affluèrent en nombre.  La fondation de La Ferté était déjà bien engagée lorsque Bernard arriva avec ses 30 compagnons.  On a souvent tendance à dire que c’est Bernard qui est le fondateur de Cîteaux.  Nous, moines, savons que ce n’est pas vrai.  Mais Bernard est le plus connu des premiers cisterciens.  Disons que Bernard a mis en paroles, dans ses écrits et ses sermons, ce que Robert, Albéric et Étienne ont commencé.  Le terreau était fertile, Bernard y fut planté par le Seigneur et a donné un fruit abondant. C’est par ses œuvres que Bernard a donné une forme littéraire à la vision monastique des fondateurs de Cîteaux.  De ce fruit abondant, nous vivons toujours.    

Rappelons encore une fois que ce sont Étienne et les fondateurs de Cîteaux qui ont rédigé la Charte de Charité.  Bernard a appliqué le maître-mot de la charité dans ses écrits, et a interprété le Livre du Cantique des Cantiques, dans la culture féodale de l’époque, pour en faire le chant d’amour de l’âme du moine avec son Époux, le Christ ressuscité. 

C’est de tout cela que nous sommes les héritiers.  Héritiers bien malhabiles, bien inférieurs à nos maîtres, qu’ils soient Bernard, Guerric, Aelred, Gilbert et tous les autres.  Essayons du moins de nous inspirer de leur science, de leur expérience spirituelle dans notre propre vie de prière, dans notre propre relation à Dieu et à nos frères.  Comme nous le rappelle la Charte de Charité, essayons à leur exemple, de « servir le seul vrai Roi, Seigneur et Maître », le Christ.

En cette célébration de fête, demandons au Seigneur de suivre l’exemple de nos saints Fondateurs et d’être comme eux, fidèles à notre vocation et attentifs à son appel pour aujourd’hui.  Que, comme l’exprimèrent les auteurs cisterciens à l’école de nos Fondateurs, nous ayons au fond du cœur le désir ardent de courir vers la vie éternelle.  Que nous soyons des témoins pour aujourd’hui de l’attente de la grande rencontre avec notre Seigneur le Christ.  Il viendra nous chercher et nous entrerons alors dans sa gloire, pour le contempler éternellement, lui, l’Epoux de notre âme, Lui que nous avons cherché tout au long de notre vie monastique.

Père Bernard-Marie

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