Trentième Dimanche du Temps Ordinaire

Jéricho et Jérusalem

Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et tomba sur des brigands…
Par hasard, un prêtre descendait… puis un lévite, enfin un Samaritain… (Lc 10,30-35)

La parabole est connue.  Jésus est en train de faire le chemin inverse.  Il monte à Jérusalem, et sait que les prêtres et les lévites, le Sanhédrin, cherchent à le faire mourir.  Et voilà que l’appel à l’aide de cet aveugle, Bartimée, sur le chemin permet à Jésus de donner un message clair à ses détracteurs.  Le comprendront-ils ? 

Jéricho était l’antithèse de Jérusalem.  Jérusalem, la capitale, se targuait d’avoir le Temple en son sein, le siège de la liturgie officielle, le lieu sacré de la rencontre avec le Seigneur.  Jéricho, la ville des palmiers, connaissait la secte de Qumrân qui avait son siège tout proche.  Les Esséniens reprochaient la collusion trop grande des prêtres avec le pouvoir de l’envahisseur romain.  Chaque fois que Jésus passait à Jéricho, Il s’émerveillait de la foi de ses interlocuteurs.  Rappelons-nous Zachée le publicain montant dans le Sycomore (Lc 19,1-10).  Aujourd’hui le fils de Timée qui crie sa foi.  Durant chacun de ses séjours à Jérusalem, Jésus était épié par les prêtres qui cherchaient au début à le faire tomber, et ensuite à le faire mourir.  Ils mettaient Jésus à l’épreuve mais n’acceptaient pas son message.  C’est pourquoi Nicodème dut se rendre de nuit auprès de Jésus (Jn 3,1-2) de peur d’être reconnu par ses homologues du Sanhédrin. 

Nous sommes vers la fin de l’évangile selon Saint Luc.  La séquence à Jéricho que nous venons d’entendre se situe pendant la dernière montée de Jésus à Jérusalem, alors que lui-même sait qu’il y sera condamné à mort.  C’est la raison pour laquelle Jésus donne un dernier message à ses détracteurs, à travers la guérison de cet aveugle.

Par ce miracle de l’aveugle qui retrouve la vue, Jésus invite à reconnaître la grâce de Dieu qui est à l’œuvre par ses mains.  Plus Jésus fait des miracles, plus les croyants reconnaissent en Lui le Messie, et plus les opposants se cabrent dans leur refus de croire.  Saint Jean a lui aussi rapporté la guérison d’un aveugle.  C’est le chapitre de l’aveugle de naissance.  Et Jésus tance ensuite les chefs religieux en leur disant :

« Je suis venu en ce monde pour rendre un jugement : que ceux qui ne voient pas puissent voir, et que ceux qui voient deviennent aveugles. »
Puis, s’adressant aux pharisiens Jésus leur répondit :
« Si vous étiez aveugles, vous n’auriez pas de péché ; mais du moment que vous dites : “Nous voyons !”, votre péché demeure. » (Jn 9,39-41)

Pour nous, le message est clair.  Mais les pharisiens refusèrent de comprendre que Jésus souhaitait leur conversion.  Dans la mesure où ils s’estimaient justes, n’ayant besoin d’aucune conversion, c’était peine perdue. 

Cela n’empêcha pas Jésus de continuer sa route, et de monter à Jérusalem, sachant que les prêtres allaient le faire mourir.  C’est ce que nous rappelle encore l’évangéliste Luc :
Jésus, le visage déterminé, prit la route de Jérusalem. (Lc 9,51)

Et ailleurs, répondant aux Pharisiens qui le mettent en garde, Jésus répond :
Il me faut continuer ma route aujourd’hui, demain et le jour suivant,
car il ne convient pas qu’un prophète périsse en dehors de Jérusalem. (Lc 13,33)

Et dimanche dernier nous entendions Jésus demander à ses disciples Jacques et Jean :
Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire,
être baptisé du baptême dans lequel je vais être plongé ? (Mc 10,38)

Lorsque Jésus quitte Jéricho pour monter à Jérusalem, la route est encore longue, elle est ardue.  Jésus quitte l’ambiance feutrée de l’ombre des palmiers et des sycomores, pour monter au Temple.  Mais les gardiens du Temple ne lui sont pas favorables, et Il le sait… 

Nous-mêmes, nous serions quelquefois tentés de demander à Jésus de siéger à sa droite ou à sa gauche, eu égard à tout ce que nous avons fait pour Lui.  Jésus nous demande alors, comme à ses disciples, si nous sommes en mesure de boire sa coupe.  Accompagnons-Le et restons-lui fidèles, sans nous enfuir lorsque la tension devient palpable et que la peur nous tenaille. 

En cette Eucharistie, demandons à Jésus de nous envoyer son Esprit pour Le suivre, quelle que soit la tâche, le service qu’Il nous demande.  Nous pourrons alors avancer, confiants en son amour et en son aide, quoi qu’il nous arrive.

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