Noël Messe de Minuit

Nuit de la rencontre avec Dieu.

Après avoir fait passer le gué du Yabbock à ses deux femmes, ses enfants et tous ses biens, Jacob resta seul et s’endormit.  Or, quelqu’un lutta avec lui jusqu’à l’aurore.  L’ange du Seigneur donna à Jacob un nouveau nom : Israël car, dit-il, tu as lutté avec Dieu et tu l’as emporté (Genèse 32).  Ce fut pour Jacob-Israël le début d’une nouvelle étape dans sa vie, le moment de la réconciliation avec son frère Esaü.

Lorsque le prophète Élie s’enfuit de Samarie il s’endormit à l’ombre d’un buisson dans le désert, priant Dieu de mourir.  Par deux fois l’ange du Seigneur le réveilla et lui ordonna de manger.  Nourri du pain du ciel, Élie marcha 40 jours et 40 nuits et rencontra le Seigneur sur le Mont Horeb, la montagne de Dieu (1 Rois 19).  Ce fut pour Élie le début d’une nouvelle étape dans sa vie de prophète, le moment où Dieu choisit Élisée pour lui succéder.

Cette nuit nous célébrons la naissance de Jésus.  Marie et Joseph se retrouvent tout à fait démunis, en terre inconnue, à loger dans une étable faute de place.  L’inconfort, la douleur de l’enfantement, la nuit noire… tout cela n’augure rien de bon.  Cet Enfant qui devait naître leur avait été donné par Dieu, mais voilà que Dieu semblait abandonner Joseph et Marie.  Mais ici, comme pour Jacob, comme pour Élie, Dieu est à l’œuvre.  Voilà que des bergers accourent, avec leurs troupeaux, pour voir le prodige.  Et les anges dans le ciel, après avoir loué Dieu devant les bergers, vinrent réjouir les jeunes parents et le bébé posé dans la mangeoire. 

Les témoins ne pouvaient pas ne pas se poser la question que d’autres se posèrent à la naissance de Jean : que sera donc cet enfant ?  Cette fois, le Messie annoncé est pauvrement posé sur un peu de paille.  Les bergers accourus étaient parmi les plus petits, les plus pauvres du peuple.  Et les anges avaient quitté le trône du Père des Cieux pour venir adorer le Fils de Dieu et fils de l’homme nouveau-né.  Un contraste… 

Alors que le Peuple attendait un roi, le Messie, le fils de David… Jésus posera la question à propos de Jean Baptiste : qu’êtes-vous allés voir au désert ?  un homme habillé de vêtements raffinés ? Mais ceux qui portent des vêtements somptueux et qui vivent dans le luxe sont dans les palais royaux (Lc 7,24-25).  Mais non, Jésus n’est pas celui-là.  Il est tout le contraire,

comme le proclamera Saint Paul dans l’Épître aux Philippiens :

Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu.
Mais il s’anéantit lui-même, prenant condition d’esclave,
et devenant semblable aux hommes (Ph 2,6-7).

Les bergers et les anges… maigre consolation pour Joseph et Marie.  Alors que l’ange du Seigneur leur avait annoncé en l’enfant à naître monts et merveilles, les voici maintenant réduits à la plus extrême pauvreté.  Les anges et leur musique ne leur apportent aucune réponse à toutes leurs questions. 

Au petit matin, contrairement à Jacob et à Élie, Joseph et Marie ne savaient toujours pas ce que Dieu attendait d’eux ni de leur enfant nouveau-né.  La joie de la naissance, la visite des bergers et des anges, ensuite la visite des mages, tout cela était de bon augure.  Mais la visite des soldats d’Hérode cherchant à tuer tous les nouveau-nés était cause d’angoisse.  La fuite en Égypte, le retour à Nazareth, l’incompréhension des foules face à Jésus dès qu’il débuta sa vie publique…  Même si l’éducation d’un enfant est source de joie et parfois de peines, de douleurs, les parents de Jésus eurent leur part de souffrances, jusqu’à la mort de leur fils sur la croix. 

Ce n’est qu’après la nuit de Pâques que Marie comprit ce qui lui avait été demandé par Dieu.  Comment ce Fils particulier, que Dieu avait pris sous son ombre et qui était née de son sein, ce Fils eut une existence exemplaire, hors norme, incompréhensible pour ses contemporains.  Si la nuit de Noël fut une nuit noire, la Nuit de Pâques fut une nuit glorieuse, rayonnante de la puissance de la résurrection. 

C’est entre ces deux nuits que nous sommes invités à mettre nos pas dans les pas de Jésus.  En cette nuit de joie, agenouillons-nous devant l’Enfant de la crèche et demandons-Lui de nous accompagner, de nous guider, sur notre chemin de sainteté.  Sans Son aide, nous ne pouvons rien faire.  Avec Lui, tout est possible.  Que la participation à cette Eucharistie en la nuit de Noël nous comble de la joie que la vision d’un nouveau-né procure.  Et reconnaissons que nous nous agenouillons devant un nouveau-né, mais pas n’importe quel nouveau-né !

Père Bernard-Marie

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