Solennité de l’Epiphanie

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Is 60, 1-6; Eph 3, 2-3a. 5-6; Mt 2, 1-12.
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Pour les mages, qui avaient suivi l’étoile depuis des jours, des semaines, des mois, la situation était tout à fait incompréhensible. Alors qu’ils se trouvaient au seuil de leur découverte, si proches du but, l’étoile avait brusquement disparu. L’astre qui avait guidé leur marche, à travers les déserts inhospitaliers comme au milieu des foules colorées d’Orient, avait tout à coup caché sa face. Cela devait sans doute avoir une signification. Cette halte à Jérusalem, dans le coeur religieux et politique du peuple de l’Alliance, était bien plus qu’une simple étape.
Ils cherchaient en effet « le roi des juifs qui venait de naître », le messie, et où le chercher sinon à Jérusalem? Jérusalem, ville des prophètes et des scribes, cité des chercheurs du Dieu Très-Haut, là où tant d’hommes et de femmes passaient leur existence à scruter les Ecritures, à prier dans le Temple, à chercher l’Indicible! L’étoile était peut-être devenue superflue, voire même inutile, dans cette ville où rayonnait l’étude de la Parole de Dieu!
Et de fait, c’est en interrogeant les « chefs des prêtres et les scribes », les sages et les savants versés dans l’étude de la Loi et des prophètes, que nos mages, ces païens venus de nulle part, ont pu découvrir où devait naître l’enfant: à Béthléem de Judée, à quelques encablures à peine de la cité sainte. Ainsi tout le monde attendait le messie, tout le monde savait où il devait venir, pourtant personne ne s’est déplacé, personne n’a bougé. Hérode a envoyé les mages, des païens, pour vérifier si la prophétie d’Isaïe venait peut-être de se réaliser!
Il fallait sans doute des païens à la foi simple et naïve, des gens qui ignoraient presque tout des Ecritures, pour prendre le risque de suivre une étoile apparue dans leur ciel, pour se mettre ainsi en route, au delà des frontières des mondes connus, et pour partir à la recherche d’un petit enfant qui venait de naître. Il fallait sans doute des hommes au coeur libre, à la foi dénuée d’arrières-pensées pour oser interroger sans fausse honte ceux qui devaient savoir. Il fallait des hommes humbles et sans prétention pour écouter la Parole de Dieu et lui obéir. Mais pourquoi les autres ne les ont-ils pas accompagnés? Croyaient-ils encore en celui qu’ils prétendaient attendre?
Comme Hérode, comme tous ceux qui l’entouraient, nous avons nous aussi bien souvent trop de choses à préserver, trop de privilèges et de biens à protéger, trop d’habitudes à sauvegarder, pour pouvoir nous mettre en route, à la suite d’une étoile. Ne nous manque-t-il pas, bien souvent, cette foi simple et sans détours des mages, pour suivre cette fragile étoile de la grâce, que le Seigneur allume parfois dans nos vies et qui doit nous mener vers Jésus? Nous attendons, mais sans attendre vraiment. Nous espérons sa venue, tout en espérant qu’il ne viendra pas déranger nos projets et nos affaires en cours.
Car il ne suffit pas, pour devenir disciples de Jésus, de scruter les Ecritures, d’en connaître les moindres subtilités, mais il faut encore que nous nous mettions nous aussi en route, que nous suivions l’étoile, que nous prenions la route du pèlerinage intérieur. Comme les mages, il nous faut quitter les abords trop connus de nos rivages, pour avancer au large, comme le demande Jésus, en dépassant ces limites que nous mettons si souvent à la charité, à la bonté, au dévouement et au partage, parce que nous craignons de trop en faire! L’étoile de Béthléem nous invite à avancer, à aller plus loin, à marcher vers Jésus, notre Sauveur, pour un jour, enfin, lui ressembler!
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