Funérailles de Frère André-Louis

Fr. André-Louis nous a devancés sur le chemin de Pâques. Dès la mi Carême, il a vécu sa Pâque : il est passé au Seigneur qui est venu le chercher avant l’aube de dimanche dernier, ce dimanche où l’on voyait le Père, oubliant tout, venir au-devant de ses fils et leur offrir et même les supplier d’entrer dans sa joie.
Déjà la vie de Dieu l’habitait, elle avait marqué toute son existence. Comme le dit Jésus dans l’Evangile : « celui qui écoute ma parole et croit au Père qui m’a envoyé, celui-là a la vie éternelle ».
C’est un long chemin qu’a parcouru Fr. André-Louis, en vrai homme de foi. Sa foi vive l’a d’abord conduit à se joindre à la Jeunesse Ouvrière Chrétienne, puis elle l’a conduit à la Trappe du Mont des Cats où il suivit la voie de frère convers. Il fut bientôt lancé dans des horizons tout à fait nouveaux avec le départ pour fonder Maromby. Et son cœur restera toujours attaché à la terre malgache et à la communauté là-bas. Il a d’ailleurs pris soin de ramener un peu de cette terre de Madagascar pour qu’elle l’accompagne dans la tombe et dans son chemin vers le Père. Les derniers temps ne furent pas faciles, surtout à partir du jour où il fut dans l’impossibilité d’assurer ce service de ‘portier’ qu’il aimait et qu’il accomplissait depuis de nombreuses années. A l’infirmerie, il fut éprouvé par la solitude plus grande, et qui s’accentuera peu à peu, au fur et à mesure que les handicaps augmentaient. Il connut aussi, les derniers mois, le désarroi de ne plus savoir prier, comme il disait ; c’était, en fait, qu’il ne savait plus lire les prières et que sa mémoire ne les lui redonnait plus. Et depuis la fin de l’’automne, son lot de souffrances s’accrût. Ce fut un lot très pesant, qu’il a porté comme il a pu, aidé par la prière des frères, très particulièrement celle des plus anciens, et soutenu par l’attention des uns et des autres. Fr. André-Louis a écouté la parole du Seigneur et il a cru : dans toutes ces étapes, la vie de Dieu l’a habité, l’a travaillé, l’a fait passer de la mort à la vie.
Mais cette vie de Dieu ne l’avait pas encore transfiguré dans tout son être. Elle l’avait laissé avec bien des questions, des inquiétudes. Non seulement des désirs non exaucés, comme celui de devenir diacre et celui de faire un parcours de lectures, un parcours d’études même. Mais il portât aussi des angoisses plus profondes qu’il avait un peu de mal à calmer et qui le mettaient en souci par rapport à lui-même et lui faisaient quêter réconfort et bienveillance.
Mais le Seigneur, s’il vient juger, comme le dit l’Evangile, est vraiment celui dont parle, dans la 1ère lecture, le livre d’Isaïe. Le Seigneur est ce serviteur qui a porté nos infirmités et nos blessures, et qui nous invite par ces mots : « Venez à la lumière ! » Il ne veut pas laisser dans les obscurités ceux qui le suivent. Il est capable de tout vaincre : « A la place des montagnes, je ferai des routes ». Le Seigneur brise les barreaux de nos prisons. Lui console et prend pitié, comme nul autre ne peut le faire, car il n’est que cela : force, tendresse et pitié.
L’épreuve la plus rude, pour Fr. André-Louis, aura été celle qui lui fit dire à certains jours : « Le Seigneur m’a abandonné, le Seigneur m’a rejeté… » Un tourment semblait s’en prendre à lui. Mais il a continué la route tant bien que mal, comme il pouvait.      Le Seigneur Jésus attendait-il davantage de son serviteur ?
Ce serait mal connaître celui qui se révèle dans la 1ère lecture. « Jérusalem disait : ‘ Le Seigneur m’a abandonnée, le Seigneur m’a oubliée’ ». Mais le Seigneur répond : « est-ce qu’une femme peut oublier son petit enfant, ne pas chérir le fils de ses entrailles. Même, si elle pouvait l’oublier, moi, je ne t’oublierai jamais. Vois, je t’ai gravé sur les paumes de mes mains. »
Veuille le Seigneur accueillir en sa maison son fils et son serviteur. Et qu’il nous accorde, qu’avec lui, nous parvenions un jour tous ensemble à la maison du Père.
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