Deuxième Dimanche de Pâques, Année C

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Act 5, 12-16; Ap 1, 9-19; Jn 20, 19-31.

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Nous ne sommes donc pas les seuls à vivre dans la peur: peur du lendemain, peur de nous distinguer des autres, peur de prendre des risques, peur de nous retrouver en tout petit nombre, peur de nos peurs si nombreuses. Au fond, le passage de l’évangile, que nous venons d’entendre, a quelque chose de rassurant, et même de consolant. Comme les premiers disciples de Jésus, nous avons, nous aussi, le droit d’avoir peur, le droit de nous inquiéter, le droit de nous enfermer à double tour, parce que nous ne savons pas comment prendre les choses, comment affronter cette réalité nouvelle. Pourquoi aurions-nous honte de nos peurs, alors que Saint Jean en fait l’un des signes les plus caractéristiques de ce petit groupe des fidèles de Jésus qui continue pourtant à se réunir, le premier jour de la semaine, malgré sa peur?

Car c’est bien là notre second point commun avec les premiers disciples . Nous sommes là, aujourd’hui, dans cette Eglise, alors qu’il n’est plus très à la mode d’être chrétien, et encore moins d’être catholique. Les journaux et autres médias ne nous épargnent guère. Comme pour les Apôtres, « auxquels personne n’osait se joindre » nous disent les Actes des Apôtres, les disciples de Jésus n’ont plus aussi bonne réputation qu’autrefois. Et pourtant nous sommes là quand même, ce matin, pour célébrer ensemble le Christ Ressuscité.

En effet, ce qui rassemblait les Apôtres, ce qui les aidait à vivre leur peur, c’était ce lien unique, particulier, qui les unissait à Jésus de Nazareth. Pourtant, ils n’avaient guère brillé, lorsque le Maître avait subi la Passion. Seul Jean était resté aux côtés de la Mère de Jésus et de l’autre Marie. Pierre lui-même, qui se disait prêt à mourir avec Lui, s’était enfui dans la nuit. Mais l’amour de Jésus était resté le plus fort. Ils n’avaient pu s’empêcher de revenir, pour goûter, une fois encore, le parfum de cette merveilleuse aventure vécue avec Lui.

C’est parce qu’ils ont tenu bon, sans céder à la tentation de se diluer dans l’air du temps, que Jésus est venu au milieu d’eux. Remarquons-le, dans cet évangile, Saint Jean ne nous parle pas encore de mission. Cela viendra plus tard. Il s’agit d’abord de contempler Jésus, de Le toucher, de L’écouter. L’Eglise, à sa naissance, comme aujourd’hui, est d’abord ce lieu où l’on touche Jésus, où on l’écoute, où le coeur est touché, retourné, transformé. Avant d’être missionnaire, et pour pouvoir devenir missionnaire, l’Eglise doit être d’abord contemplative. On ne peut annoncer, avec le feu de la conviction, que ce que l’on a soi-même vécu, expérimenté, touché. Sinon, comment les autres nous croiraient-ils? Et cette mission commence avec Thomas, un proche, un fidèle, mais qui était absent, distrait, qui commençait déjà à s’éloigner.

La mission de l’Eglise commence donc d’abord en son sein. Si les chrétiens ne brûlent pas du feu de l’amour, de la passion de la vérité, de l’enthousiasme de la bonté et du don de soi, comment donc enflammeraient-ils le monde? Nous avons besoin les uns des autres pour grandir dans la foi, progresser dans la connaissance de la vérité. C’est dans la mesure où nous prendrons conscience de cette responsabilité que nous avons les uns à l’égard des autres, en portant les fardeaux les uns des autres, que nous pourrons, dans la ferveur de l’Esprit, rayonner du don de Dieu.

Mais cela suppose aussi de notre part cette double fidélité dont nous parlait Saint Jean. Car notre foi a besoin d’être nourrie, fortifiée, au contact régulier du mystère de la Parole de Dieu et du Corps du Seigneur. Sans Sa Parole, sans Son Eucharistie, nous ne pouvons rien faire. C’est parce que nous vivrons de Lui que Lui nous fera vivre, qu’il multipliera nos communautés, qu’il les rendra vivantes et ferventes, comme nous le disait la première lecture tirée des Actes des Apôtres.

Nous sommes plus nombreux, ce matin, que cette première communauté qui est à l’origine des deux milliards de chrétiens qui existent aujourd’hui. Alors, de quoi aurions-nous peur? Ne nous laissons pas paralyser par nos inquiétudes, la pauvreté de nos moyens. Sans Lui, nous ne pouvons rien faire, certes, mais avec Lui, tout devient possible! Avec Lui, plus rien n’est impossible!

 

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