« Heureux es-tu, Simon fils de Yonas ! » Ce bonheur que vit Simon a une composante bien particulière : c’est que, si c’est bien lui, Simon, qui est heureux, il ne le doit pas à lui-même mais à d’autres. A d’autres qui œuvrent avec lui en lui. Le Père d’abord : « ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela mais mon Père qui est aux cieux ». Mais aussi le Fils : « moi, Je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise ».
Du jour de la Pentecôte, Pierre a fait beaucoup : des discours, des guérisons, des voyages… Des discours : oui, mais s’il parle, ce n’est pas éloquence naturelle, ni pour cause d’ivresse, c’est l’œuvre du Seigneur : « Moi, dit le Seigneur Dieu, je répandrai de mon Esprit sur toute chair et ils prophétiseront. Des guérisons comme la première racontée au livre des Actes : Pierre n’a rien, il n’a qu’une chose, …Jésus. « De l’or et de l’argent, des techniques, je n’en ai pas, mais ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus le Nazaréen, marche ! »
Et aujourd’hui, Pierre se trouve sous bonne garde de quatre escouades de quatre soldats, attaché avec deux chaînes, et aux portes, des sentinelles. Bien bloqué, Pierre. Mais justement, c’est le Seigneur qui prend les choses en mains, incroyablement, et tout s’ouvre devant lui.
Paul, lui, paraît faire par lui-même beaucoup de travail, comme par son propre génie. Mais il n’en est rien. Toute sa vie de chrétien est établie sur un terrassement – il est jeté à terre –. Le Seigneur Jésus, celui qu’il persécute, l’a saisi. Il ne le lâchera plus. Cela à travers tant de revers et d’épreuves. Jusqu’à être rejeté, abandonné… comme l’évoque la deuxième lettre à Timothée que l’on vient d’entendre. « Personne ne m’a assisté, tous m’ont abandonné ». Mais l’expérience de Paul est de percevoir, justement dans cette situation très dure, toute la présence de son Seigneur. « Le Seigneur, lui, m’a assisté. Il m’a rempli de force » pour dire l’Évangile jusqu’au bout de ma vie et jusqu’au bout du monde. Et sa confiance est totale : son avenir est dans les meilleures mains, même dans les maux qu’il voit venir. « Le Seigneur me fera encore échapper à tout ce qu’on fait pour me nuire ».
C’est dans le Seigneur qu’est leur foi à tous les deux, Pierre et Paul. Et le Seigneur travaille à son Royaume par eux. Ce Royaume en naissance, c’est l’Église. Non pas un organisme de propagande au service d’une doctrine, d’une idée. Mais un corps vivant vivifié par la grâce de Dieu. Des hommes de chair et de sang dont le Christ a fait son corps par l’Esprit Saint qu’il a répandu sur eux.
Ces hommes restent de chair et de sang, ils restent Pierre et Paul. Seulement, l’Esprit leur infuse à la racine de leur être ce témoignage : « le Seigneur Jésus m’a aimé et s’est livré pour moi ». Aussi tout ce qu’ils sont, tout ce qu’ils vivent tend vers lui, Jésus, vers lui qui est le Royaume. Leur Seigneur les y tirera, comme il y tire toute l’Église depuis des siècles, comme il y tire notre Église d’aujourd’hui : en dépit de tout.
« Le moment de mon départ est proche…
Le Seigneur me sauvera et me fera entrer dans son Royaume » ;
le Seigneur nous sauvera, et nous fera entrer dans son Royaume.
A lui la gloire pour les siècles.
Père Abbé