Cet Évangile de début d’Avent évoque un futur : la venue du Fils de l’homme. « On le verra venir dans la nuée, avec grande puissance et grande gloire ». Cette annonce du futur vise à construire notre présent : à vivre notre présent dans cette perspective de la venue du Seigneur Jésus.
La vie ordinaire nous entraîne dans un rythme souvent bien rapide. Et elle nous retient par toutes ses nécessités, ses imprévus, ses habitudes. Et peut-être cet engloutissement dans le quotidien est-il renforcé encore par l’anxiété diffuse autour de la mort que l’on cherche à gommer, renforcé aussi par cette autre anxiété qui naît des perspectives d’avenir, le plus souvent peu réjouissantes, que l’on suppute pour l’univers.
Jésus fait brèche dans tout cela. Sa venue au milieu de nous, son incarnation, son chemin de vie jusqu’à sa mort en croix et sa résurrection, ouvrent toute l’histoire des hommes à un autre avenir et à un autre présent.
Un jour, il viendra. Un jour, le Fils de l’homme paraîtra. Un jour, Jésus ressuscité se manifestera à tous. Ce fait donne au temps une perspective nouvelle. Rien n’est changé dans les données du quotidien, mais cette venue à venir, fondée sur la vie de maintenant du Ressuscité, ouvre le temps : elle ouvre le cœur.
L’Évangile l’appelle : ‘notre rédemption’. On pourrait dire aussi : ‘notre délivrance’, ‘notre libération’. Les deux premières lectures nous aident à comprendre de quoi il s’agit.
La première, tirée du prophète Jérémie, est un oracle de bonheur : « Voici venir des jours où j’accomplirai la promesse de bonheur que j’ai adressée à la maison d’Israël ». En ces jours-là, le droit et la justice reviendront dans le pays. Ce sera tellement dû au Seigneur que le pays aura pour nom ‘Le Seigneur est notre justice’.
Dans les faits, qu’en est-il ? La seconde lecture donne une part de la réponse. Ce bonheur, n’est-ce pas ce que S. Paul voit en train de grandir chez ses Thessaloniciens auxquels il écrit ? « Que le Seigneur vous donne, entre vous et à l’égard de tous les hommes, un amour de plus en plus intense et débordant, comme celui que nous avons pour vous ». Quelque chose s’est passé chez eux, leur vie a pris une dimension nouvelle, le Seigneur est leur amour, leur justice. Et ce qui naît là ne peut s’éteindre, car c’est semé par Jésus dans le concret de notre terre.
Bien sûr, il est clair que la justice et le droit sont loin de remplir l’univers. Mais Jésus les a semés dans notre terre. Et avec les Thessaloniciens, nous espérons désormais notre délivrance totale, et avec elle celle du cosmos tout entier.
C’est l’espérance de Paul, c’est l’espérance chrétienne. « Qui nous séparera de l’amour du Christ ? …Comment Dieu, avec son Fils, ne nous donnera-t-il pas tout ? »
Cette espérance nous fait vivre le temps dans une perspective absolument nouvelle, celle qu’a créée Jésus venu se faire l’un de nous.
Père Abbé