Pâques, Messe du Jour

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Act 10, 34a. 37-43; Col 3, 1-4; Jn 20, 1-9.

 

 

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Lorsque l’Apôtre Pierre veut parler de Jésus à ceux qui ne le connaissent pas, il déclare que « là où il passait, il faisait le bien et il guérissait tous ceux qui étaient sous le pouvoir du démon ». Ce qui avait le plus marqué Pierre, et tous ceux qui avaient entendu parler de lui, c’était la bonté de Jésus. Jésus était bon, il rayonnait le bien tout autour de lui, et parce qu’il était bon, il suscitait l’amour et la tendresse de tous ceux qui avait eu l’occasion de le rencontrer.

 

 

Et pourtant, Pierre continue en ajoutant qu’ « ils l’ont fait mourir en le pendant au bois du supplice ». Quel paradoxe! Pourquoi celui qui est bon doit-il souffrir? Pourquoi doit-il mourir? Il y a là un étonnant mystère qui demeure, après des siècles. Quand l’amour se révèle, quand la bonté se manifeste, nous les rejetons, nous les condamnons, nous les méprisons. Nous parlons d’amour, nous le chantons et le mettons en scène, de multiples façons. Mais, curieusement, l’amour et la mort sont intimement liés, comme si l’amour ne pouvait aboutir, comme si la mort devait toujours finir par vaincre l’amour.

 

 

C’est d’ailleurs bien dans cette perspective que se situent Marie Madeleine et les disciples de Jésus. S’ils courent au tombeau, c’est d’abord pour se rendre compte du sacrilège: « on a enlevé le Seigneur de son tombeau »! Pour eux non plus, l’amour désarmé et humilié de Jésus n’a aucune chance devant la mort. Certes, Jésus leur a parlé de sa Résurrection d’entre les morts, mais les évangélistes nous répètent à l’envi qu’ils ne comprenaient pas ce qu’il leur disait. Pour eux, comme pour nous, il y a une mystérieuse connivence entre l’amour et la mort, entre l’excès d’amour et la fin tragique de celui qui aime.

 

 

Ils auraient pu repartir comme ils étaient venus, un peu plus tristes d’avoir perdu le corps de celui qu’ils avaient tant aimé. Mais voilà que l’amour a commencé à faire son oeuvre dans le coeur du disciple bienaimé. Le pire n’était pas le plus probable. Ce qu’il venait de voir: les linges bien rangés, le linceul roulé à part, étaient devenus pour lui des signes. Quelque chose ne collait plus. Le tombeau ressemblait davantage à la chambre d’un vivant qui venait de s’absenter et qui allait revenir, qu’à la dernière demeure d’un mort. Seul le regard d’un ami pouvait discerner dans ces infimes petits détails les traces d’un Vivant!

 

 

Jean connaissait bien Jésus. Ce qu’il venait de découvrir s’était alors mis à réveiller sa mémoire assoupie. Jésus l’avait bien dit, il l’avait même répété. Les Ecritures l’avaient annoncé. La tragédie qui scellait dans un même élan l’amour et la mort venait de se dissiper sous ses yeux. L’amour vécu jusqu’au bout, poursuivi inlassablement, recherché avec passion, ne conduirait plus jamais à la mort, mais à la vie. La bonté avait désormais sa place en ce monde. Plus jamais elle n’y serait étrangère et humiliée. Jean venait brusquement de comprendre que Jésus avait définitivement changé le cours de l’histoire.

 

 

Cette conversion, cette transformation de notre jugement, cette libération de notre capacité d’aimer et de faire le bien, nous sommes nous aussi appelés à la vivre. Ne sommes-nous pas, nous aussi, trop souvent enfermés dans cette logique de peur et de mort qui nous empêche de croire que l’amour est plus fort que la mort, que la bonté aura le dernier mot de l’histoire? Ne sommes-nous pas tentés, comme nombre de nos contemporains, de douter de la force de l’Evangile, de nous décourager, de désespérer? Et pourtant, Jésus est vraiment Ressuscité! Osons reconnaître les signes qu’il laisse dans nos tombeaux! Osons croire, comme Jean, que tout est désormais possible, pour celui qui croit, pour celui qui aime et fait le bien!

 

 

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