Jésus priait.
Nous avons peu de témoignages de la prière de Jésus durant sa vie. Nous savons seulement, par le témoignage des évangélistes, que Jésus se retirait fréquemment la nuit, seul, pour prier son Père. Mentionnons également les 40 jours que Jésus passa dans le désert de Judée comme nous le rappelait la liturgie de dimanche dernier.
C’est après avoir passé 40 jours dans le désert que Jésus entame son ministère public. C’est après avoir passé la nuit en prière qu’Il choisit les douze apôtres. C’est après avoir passé la nuit en prière qu’Il enseigne à ses disciples le Notre Père. Après avoir nourri les foules avec 5 pains et quelques poissons, Jésus se retire dans la montagne puis rejoint les disciples en marchant sur la mer. On pourrait multiplier les exemples… Mais jamais les disciples ne sont témoins de ce qui se passe entre Jésus et son Père. Sauf en trois occasions : le Baptême, la Transfiguration et la Passion.
Regardons ce que ces trois révélations de la prière de Jésus ont apporté aux disciples. Au Baptême, Dieu le Père affirme au Baptiste que Jésus est le Prophète attendu. Des disciples de Jean qui ont assisté à la scène, décident de se mettre à la suite de Jésus.
Peu avant la Transfiguration, nous avons le dialogue de Jésus avec ses disciples à Césarée de Philippe. Lorsque Jésus leur demande : Et pour vous, qui suis-je ?, Pierre répond avec conviction : Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant ! (Mt 16,16). Se sentant investi d’une autorité spéciale après la réponse que Jésus lui a faite : Heureux es-tu Simon, fils de Jonas… (Mt 16,17), Pierre fit de vifs reproches à Jésus après que celui-ci eût annoncé pour la première fois sa Passion prochaine (Mt 16,22).
Jésus se rend compte que les affirmations de Pierre sont fugaces et variables. Afin de le préparer, lui et les autres disciples, à la passion qui semble inéluctable, Jésus décide de faire entrer ses disciples les plus proches dans l’intimité de sa relation avec Dieu son Père. C’est pourquoi, sur une haute montagne, Il se montre à eux transfiguré. Saint Luc précise, dans son évangile, que Moïse et Élie parlent avec Jésus de son départ qui allait s’accomplir à Jérusalem (Lc 9,31).
Jésus reviendra sur cette expérience lorsque, durant le discours après la Cène, il dit à Pierre : Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous passer au crible comme le blé. Mais j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères (Lc 22,31-32).
Devant la grâce insigne qui leur fut faite, et devant la scène inénarrable de la transfiguration elle-même, on peut comprendre, sans que les évangélistes ne doivent le préciser, que Pierre Jacques et Jean n’avaient pas les mots pour raconter leur expérience. Ces mots leur viendront après la résurrection de Jésus.
Au jardin de Gethsémani, les trois disciples qui sont invités à suivre Jésus au plus près sont également Pierre, Jacques et Jean (Mt 26,37). Pour ne pas être complètement effondrés par ce qu’ils voient et entendent, depuis la prière de Jésus : Père, non pas ma volonté mais que ta volonté soit faite…
jusqu’à la mort sur la Croix : Père, en tes mains je remets mon esprit…
les trois disciples avaient besoin de se ressouvenir de la Transfiguration. L’épreuve fut terrible au point que Pierre, malgré tout, renia son maître : je ne le connais pas. Tombé tellement bas, il pleura amèrement mais fut pardonné par un regard Jésus. Après la résurrection de Jésus, Pierre put affermir ses frères et les aider à comprendre les événements.
Dans notre vie, nous ne sommes pas soumis à de telles épreuves. Dans le Notre Père, Jésus nous invite à demander de ne pas « succomber » à la tentation. Lorsque l’épreuve survient, Dieu nous donne la force nécessaire pour ne pas tomber. À nous de le reconnaître, à nous d’appeler l’aide de Dieu et de ne pas compter sur nous propres forces. C’est ce que nous enseigne le message de la Transfiguration lorsqu’on le met en perspective de la passion de Jésus. Comment les disciples n’auraient-ils pas été tentés de se détourner de Dieu s’ils n’avaient pas eu cette vision de gloire peu de temps avant la vision de Gethsémani ?
Durant ce Carême, demandons à Dieu de nous combler de sa grâce pour rester fort dans les moments difficiles. Nous devons prendre vraiment conscience que Jésus est toujours avec nous, à nos côtés. Il ne nous abandonne pas si nous faisons appel à lui dans notre détresse. Qu’Il soit notre joie et notre réconfort dans tout ce que nous sommes appelés à vivre.
Frère Bernard-Marie