Les bombardements de l’année 1918.

Alors que depuis le début de la guerre la communauté du Mont des Cats est disséminée sur tous les fronts, les bâtiments servirent d’hôpital à plusieurs reprises et pour toutes les armées impliquées dans la guerre.
La dernière offensive allemande sur le front allant de la Somme jusqu’à l’Yser débuta en mars 1918.  Bailleul fut bombardé le 18 mars, tandis que les allemands reprennent du terrain autour d’Armentières.   Ce fut le 12 avril que l’on commença à s’apercevoir au Mont des Cats de la trouée faite par les Allemands dans la région d’Armentières.  Les routes étaient bondées de fugitifs en provenance de Bailleul et des villages alentour.
Le samedi 13 avril à deux heures du matin, des prêtres des environs viennent prévenir le Père Abbé Dom Bernard Richebé que le monastère serait la proie des flammes dans ce jour même.  Les moines encore présents rassemblèrent quelques habits au cas où il faudrait fuir, mais rien ne se passa.
Le dimanche 14 avril Père Léon, cellérier, vint du refuge de Watou et il fut décidé de faire partir toutes les vaches à Watou car il n’y avait plus d’ouvriers au Mont des Cats pour assurer la traite.
Le lundi 15 avril, alors que les frères chantaient le Salve Regina à la fin de l’office de Complies, les obus commençaient à tomber en clôture.  Peu après 20 heures, alors que les frères se couchaient, un obus tomba dans le bureau du Père Abbé.  Il était passé par la fenêtre et mit le parquet et toutes les affaires sens dessus dessous.  Le Père Abbé ordonna alors aux frères d’aller dormir dans les caves sous le cloître – ces caves ne servaient pas à l’affinage des fromages à cette époque -.
Le lendemain matin il fut décidé que tous les frères se rendraient au refuge de Watou, à l’exception de l’Abbé et de Frère Cyrille.  Le mercredi 17 des frères revinrent de Watou pour déménager les porcs et leurs aliments.
Lors d’une nouvelle visite au Mont des Cats le vendredi 19 avril, les frères remarquèrent que le moulin de briques, qui se trouvait près du calvaire derrière la grotte de Lourdes, avait perdu sa tête.  Des obus étaient également tombés autour de la brasserie, des ateliers et des bureaux, mais sans grands dégâts.  Ayant pris des vêtements et des objets dont ils avaient besoin à Watou, les moines étaient à Godewaersvelde lorsqu’un obus tomba sur l’église.  Un nuage de fumée enveloppa tout le monastère, mais personne ne se doutait des dégâts causés à ce moment.  La nuit suivante, même à Watou des bombes tombèrent tout autour du refuge des moines.
Le samedi 20 Dom Bernard refusa que des frères aillent inspecter l’abbaye.  Des démarches furent menées pour évacuer les plus anciens vers La Trappe.  Mais il fallait trouver des moyens de locomotion.
Le dimanche 21 quelques frères allèrent visiter l’abbaye et en ramenèrent des objets ramassés au chapitre et au vestiaire.  Ils s’aperçurent que l’obus de vendredi avait défoncé la voûte de l’église qui s’était depuis en grande partie écroulée.
Le lundi 22 avril un groupe de religieux partait pour la Grande Trappe grâce au prêt d’une voiture et à l’utilisation pour les autres du camion de l’abbaye.  14 moines furent ainsi sortis de la zone des combats, en plus de trois frères qui avaient été envoyés à La Trappe dès le début de la guerre.  Les jours suivants plusieurs allers-retours au Mont des Cats permirent de récupérer des livres du chapitre et du matériel, jusques et y compris les presses à fromage transportés avec la participation de quelques soldats français.
Le mardi 7 mai la bataille fut rude sur le Mont Kemmel qui fut repris par les allemands.
Le jour de l’Ascension, 9 mai 1918, l’on bombarda le Mont des Cats.  Ce bombardement cause de grands dégâts à l’abbaye, comme les moines l’apprirent lorsqu’il leur fut possible d’y remonter.  Seuls quelques articles de journaux donnaient l’état des lieux aux religieux réfugiés à Watou.  Ce n’est que le samedi 29 mai qu’il fut enfin possible de monter inspecter les lieux.

Récit de la visite au Mont des Cats le 29 mai 1918.

Durant le mois de juin plusieurs voyages furent effectués pour récupérer au Mont des Cats ce qui était récupérable.  Les ornements liturgiques et le tapis de l’église furent envoyés à La Trappe avec les livres de chœur qui avaient été sortis des décombres de l’église.  Le reste de livres du chapitre, et même la moissonneuse furent transportés à Watou.  Durant le mois de juillet on rapporta également les instruments aratoires.
Le 15 juillet Dom Bernard Richebé vint visiter pour la première fois depuis les bombardements l’abbaye.  Il décida de continuer de rapatrier à Watou ce qui pouvait l’être, et de ramasser tous les livres de chœur qui pouvaient encore être enfouis dans l’église.  On ramena également les habits qui étaient encore au vestiaire.  Ensuite l’on se chargea de faire les récoltes tant au Mont des Cats qu’à la ferme de Watou.
Le 2 septembre, alors que les allemands quittent le front abandonnant le Mont Kemmel et Bailleul, des religieux retournent quotidiennement à l’abbaye pour aménager quelques lieux pour recevoir un embryon de communauté.
Le 6 septembre 1918, le Père Abbé, le Père Prieur, trois religieux et un domestique s’installent comme ils peuvent dans l’hôtellerie.