Vigntième Dimanche du Temps Ordinaire

Les prières d’ouverture des Eucharisties du dimanche ont été choisies en fonction de l’Evangile. Cela se vérifie bien aujourd’hui. Mais l’Evangile de ce dimanche et la prière d’ouverture sont comme à deux niveaux différents : dans l’Evangile, une femme demande une guérison précise ; dans la prière, nous demandons quelque chose que nous ne connaissons pas précisément, et qui même « surpasse tout désir », comme dit le texte. Ce qui nous invite à examiner ce que nous demandons.

Pour la Cananéenne, tout semble clair. Sa fille est malade, « tourmentée par un démon » : elle veut sa guérison, et elle en prend les moyens, elle n’épargne pas les oreilles de Jésus et de ses disciples. Ses moyens sont pourtant bien faibles puisqu’une telle guérison est de l’ordre de l’impossible humain, de l’ordre du miracle. De plus, cette femme est comme disqualifiée d’entrée de jeu du fait de sa non-appartenance à Israël, et elle le sait. N’empêche, elle crie quand même, et plus fort même. « Seigneur, au secours ! » Et Jésus lui accorde ce qu’elle demande, cela en raison de sa foi : « Femme, ta foi est grande ». Elle est grande, en effet, sa confiance en Jésus, sa confiance dans sa capacité d’être sensible à son appel, dans sa capacité d’entendre, d’être touché, et de changer de position. Elle est grande sa foi en la personne de Jésus tout simplement. Elle obtient de lui quelque chose d’incroyable pour l’homme.
La prière d’ouverture d’aujourd’hui se termine, elle, sur l’évocation d’un « héritage promis qui surpasse tout désir ».
La formule « tout désir » peut signifier « n’importe quel désir ». Et en ce sens, faire allusion à tous ces désirs qui nous habitent.  Portant sur des choses de tous ordres, petites et grandes. Pour certains de ces désirs, nous irons jusqu’à imiter la Cananéenne, et cela conformément aux dispositions de l’Evangile lui-même : « Demandez, il vous sera donné » (Mt 7, 7).
Mais nous devinons bien aussi que, en-deçà de cette multiplicité de désirs, il y a enraciné au centre de nous-mêmes un désir fondamental, qui nous entraîne au-delà de nos demandes concrètes. Il se manifeste le plus clairement dans la rencontre de la personne aimée. Il pousse à nous ouvrir, si nous le voulons bien, à un au-delà de nous-mêmes ; il nous attire vers la possibilité d’une relation humaine d’une qualité inespérée, et que nous n’aurions su exprimer dans des mots, mais qui, en fait, vient exaucer, comme tout naturellement, notre attente et déployer notre être au-delà de ce que nous aurions pu imaginer.
Ce désir fondamental s’arrête-t-il là d’ailleurs ? Non.  Parce que Jésus est passé dans nos vies, et il nous a donné de pressentir un désir à la source même de notre propre désir. Il nous a donné de découvrir que nous étions bien plus désirés que nous ne pourrions jamais désirer nous-mêmes.

Alors s’annonce pour nous des biens que nous ne pouvons pas voir, comme dit la Prière de ce dimanche, et finalement un « héritage qui surpasse tout désir ». Un héritage qui n’est plus mesurable par la personne quelle qu’elle soit. Un héritage qui est à la mesure non de l’homme mais de Dieu et de sa bonté infinie.
Ce pour quoi nous rendons déjà grâces dans toute Eucharistie.

Père Abbé

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