Dans la deuxième section de cet Evangile, l’objectif de S. Luc est simple : pouvons-nous, oserons-nous prier le Père ? Ce Père, que Jésus nous invite à prier, « Père, que ton nom soit sanctifié », ce Père, qui est-il ? quelle image pouvons-nous en avoir ?
Jésus prend d’abord la figure de l’ami. Mais l’ami de l’homme dans le besoin est-il vraiment un ami ? Il n’a pas l’air de vouloir se bouger. Sa réponse est péremptoire ; c’est non. Quand l’autre insiste au-delà du raisonnable, il cède ; mais on nous dit bien que ce n’est pas vraiment par amitié, mais plutôt pour avoir la paix.
Jésus prend ensuite une autre figure forte, celle du père de famille, ce que sont ces hommes qui l’écoutent. Comme l’ami, ces gens ne sont pas montrés sous leur bon côté : « vous, tout mauvais que vous êtes », dit Jésus. Et pourtant, vous vous laissez toucher quand vos enfants vous demandent un poisson ou un œuf. Vous leur donnez de bonnes choses.
Et Jésus en vient alors au Père. Ce Père qui l’est tellement plus que vous, leur dit-il ! Ce Père-là qui ne peut que donner à ceux qui le lui demandent. Ce Père ne peut être qu’infiniment meilleur qu’un mauvais ami qui finit par donner, infiniment meilleur qu’un père de famille plus ou moins bon ou mauvais qui donne malgré tout. Le Père des cieux ne peut que répondre infiniment mieux à notre appel.
Il répond d’ailleurs au-delà de ce que nous lui demandons, puisque, selon cet Évangile de Saint Luc, le Père se donne en quelque sorte lui-même à ceux qui le prient. Il donne tout ce qu’il est en lui-même, il donne ce feu qu’il est, il donne l’Esprit d’amour. Saint Isaac le Syrien, moine du VIII° siècle, disait ceci : Dieu ne peut que donner son amour. Dieu est amour, Dieu n’est qu’amour, Dieu ne peut que donner son amour.
C’est à ce Dieu-là que Jésus nous invite à dire : « Père ! » A ce nom par lequel Jésus lui-même l’appelle, « Abba, Père », il ne peut que répondre. Aussi l’Evangile le montre-t-il à l’œuvre : si quelqu’un demande, le Père lui accorde ; si quelqu’un cherche, le Père le fait trouver ; si quelqu’un frappe, le Père ouvre la porte.
De plus, depuis la venue de son Fils au milieu de nous, dans notre terre et dans notre chair, le Seigneur est lui-même le premier à frapper à notre porte. Comme dit Macaire, moine du V° siècle : le Seigneur, lui, s’approche toujours de nous, il frappe, il cherche à entrer et à se reposer en nous ; il ne cesse pas d’œuvrer dans ce sens.
A notre appel « Père, notre Père », il ne manquera pas d’entrer chez nous, et de donner cet Esprit Saint par lequel il se donne tout entier à son Fils.
Père Abbé