Solennité de Pâques, messe du Jour

Ils n’avaient pas compris…

Nous avons tellement l’habitude de vivre chaque année la Semaine Sainte dont le sommet est la fête de Pâques, que nous avons du mal à nous rendre compte de ce que les disciples vécurent dans les premières heures du premier jour de la semaine. 
Nous avons également trop souvent entendu les annonces que Jésus fit de sa mort prochaine et les paroles qu’Il disait alors : ‘et trois jours après je ressusciterai’.   Mais précisons ici que Saint Jean ne mentionne pas d’annonces de la Passion comme telle.  Mais, si Jésus est monté à Jérusalem, c’est parce qu’Il a décidé que « son heure est venue ».  La condamnation à mort est inéluctable…
Ni Marie-Madeleine, ni les apôtres Pierre et Jean, ne comprennent ce qu’ils voient et entendent.  Le tombeau est vide, les linges sont posés là, mais le corps, personne ne sait où il est.  Si Marie-Madeleine court avec sa question, si les disciples courent en sens inverse pour vérifier les dires de la femme, c’est justement que, pour tous, la mort de Jésus est la catastrophe dont ils craignent de ne jamais se relever. 
Rappelons-nous : Jésus monte à Jérusalem en annonçant sa mort prochaine.  Les disciples Jacques et Jean viennent avec leur mère demander à Jésus de siéger à sa droite et à sa gauche dans son royaume.  Tous s’attendaient donc à l’instauration avec éclat d’un ordre nouveau, avec Jésus comme Maître et Seigneur du Royaume.  Et voilà que tout tourne à l’envers.  Judas vend Jésus pour trente pièces, pensant que cet acte l’obligera à se révéler dans sa royauté.  Mais Jésus est arrêté et condamné à mort.  Non seulement condamné à mort, mais humilié à l’extrême et exécuté comme le dernier des malfaiteurs, sous les ricanements des chefs et les sarcasmes du peuple. 
Tout avait pourtant si bien commencé, comme le rappelle Pierre dans l’extrait des Actes des Apôtres que nous avons entendu en première lecture :
Là où il passait, il faisait le bien
et guérissait tous ceux qui étaient sous le pouvoir du diable, car Dieu était avec lui.
Les disciples tremblent de peur et sont prêts à toutes les compromissions pour ne pas être arrêtés à leur tour.  Pierre avait renié Jésus au moment de son arrestation dans le Jardin des Oliviers, et tous s’étaient enfuis tremblants de peur.  Rassemblés dans la Chambre Haute, qui avait été le lieu du dernier repas avec leur maître, les disciples et quelques femmes en verrouillent les portes, tellement est grande leur angoisse.  
Même s’il est écrit du disciple que Jésus aimait Il vit et il crut, il fallut encore du temps aux apôtres pour comprendre ce qui était arrivé, et pour se lancer dans la proclamation de cette bonne nouvelle que Christ est ressuscité.  Rappelons-nous cet autre texte de l’évangile selon Saint Jean, au chapitre 21, où nous retrouvons Pierre et ses compagnons repartis pêcher la nuit sur le Lac de Tibériade.  Même le disciple que Jésus aimait faisait partie de la nuit de pêche. 
La dernière phrase de l’extrait de l’Évangile de ce jour précise bien l’état d’esprit des disciples :
… les disciples n’avaient pas compris que, selon l’Écriture,
il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts.
Et ils ne comprirent pas immédiatement…  D’après les éléments que nous rapportent les évangiles, il leur fallut attendre le don de l’Esprit Saint à la Pentecôte pour vraiment comprendre la résurrection de Jésus.  La nouveauté était telle qu’il leur fallait découvrir par eux-mêmes que Jésus était passé de la mort à la Vie, et qu’Il nous invite, tous, à suivre sa voie pour entrer dans la vie éternelle.  C’est pourquoi Paul peut écrire aux Colossiens, comme nous l’entendions en deuxième lecture :
Pensez aux réalités d’en haut, non à celles de la terre.
En effet, vous êtes passés par la mort,
et votre vie reste cachée avec le Christ en Dieu.
Le temps pascal dure 50 jours…  Pour bien comprendre ce que la résurrection de Jésus implique pour nous, dans notre vie quotidienne et dans notre foi en la vie future, il nous faut bien aussi 50 jours chaque année…  Depuis jeudi soir, nous avons suivi Jésus dans ses derniers jours, dans sa Passion et sa mort.  En ce matin de Pâques nous célébrons sa victoire.  La victoire de la Vie et de l’amour, sur la mort et le péché.  Telle est la Bonne Nouvelle qui nous rassemble aujourd’hui.  C’est la foi en cette Bonne Nouvelle qui anime notre vie de chrétien, tout au long de l’année.  Mais, en ce jour de Pâques, rappelons-nous que l’événement que nous célébrons a marqué à jamais le cours de l’histoire. 
C’est ce que nous, moines, proclamons à l’ouverture des offices de Laudes et de Vêpres pendant tout le temps pascal :
Christ est ressuscité des morts, par sa mort Il a vaincu la mort,
A ceux qui sont dans les tombeaux Il a donné la vie !
Que la joie de Pâques illumine toute notre journée. 
Que la résurrection de Jésus conforte notre foi en notre propre résurrection. 
Oui, l’amour que nous donnons et recevons durant notre vie sur terre trouvera son accomplissement lorsque Dieu nous rappellera à Lui après notre mort. 

Frère Bernard-Marie

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