Quatrième Dimanche du Temps ordinaire, Année B

Abbaye de Rougemont, Canada.
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Dt 18, 15-20; 1 Cor 7, 32-35; Mc 1, 21-28.
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Dès les premiers instants de son ministère public, Jésus a suscité la trouble et la division. Alors que Saint Marc, dans son évangile, n’a encore rapporté aucune des paroles de Jésus, voilà déjà la contradiction et les questions qui se lèvent: « que nous veux-tu, Jésus de Nazareth »? « Qu’est-ce que cela veut dire »? Les interrogations fusent et avec elles, leur cortège de soupçons et d’interprétations. Alors qu’il vient tout juste d’inaugurer son ministère public, Jésus se trouve déjà en butte à la suspicion, à la méfiance, au doute.
Les uns prétendent savoir qui il est: « je sais fort bien qui tu es, le Saint, le Saint de Dieu »! Et curieusement, les premiers à proclamer son origine, à annoncer sa divinité, ce sont les démons, les esprits mauvais. Les autres ne comprennent pas et sont « saisis de frayeur »: « qu’est-ce que cela veut dire »? Certes sa renommée se répand dans toute la région de la Galilée, mais cette renommée ressemble fort à une rumeur, colportant tout et son contraire. Dès les premiers instants de son ministère, Jésus est incompris, sa parole prête à confusion, tout semble se liguer contre lui pour brouiller le message qu’il est venu annoncer.
Face à ce déchaînement de bruits et d’interprétations, Jésus cherche à imposer le silence: « silence, sors de cet homme »! Pour que la Parole de Dieu puisse être entendue et accueillie, elle a besoin d’un coeur ouvert et paisible, d’un coeur qui écoute. Face à cette agitation et au trouble ainsi créé, Jésus va choisir la seule attitude possible: le silence. Il va créer, autour de lui, un espace de silence, un climat de silence et de secret. C’est le fameux secret messianique de l’évangile de Marc. Saint Marc ajoutera même, un peu plus loin, à la fin du chapitre premier, que Jésus « se tenait dehors, à l’écart, dans des lieux déserts ».
Si Jésus cherche le silence, le secret, le désert, ce n’est pas parce qu’il fuit les hommes, parce qu’il craint leur contact et leur présence. Comme Dieu entraînait son peuple au désert, quand Il voulait parler à son coeur, dans l’Ancien Testament, de même Jésus nous emmène à l’écart, dans le silence, loin des rumeurs, du brouhaha des foules et du « souci des affaires ». Comme nous le rappelait Saint Paul, dans la seconde lecture, cette sérénité nous est nécessaire pour que la Parole de Dieu puisse résonner en nos coeurs, et pour que nous puissions nous « attacher au Seigneur sans partage ».
Dans ce monde troublé, traversé de mille rumeurs, de mille craintes, sans cesse agité par mille désirs et mille inquiétudes, il ne nous est pas toujours facile de trouver la paix du coeur. Tant de voix se déchaînent autour de nous et en nous pour susciter des émotions aussi contradictoires que la peur et l’enthousiasme, l’espoir et le découragement, l’horreur et l’émerveillement. Pris dans ce tourbillon d’émotions et de stimulations, nous avons du mal à discerner le vrai du faux, le bien du mal. Nous nous enfermons alors dans une attitude de doute et de soupçon, nous rendant imperméables à la Parole de Dieu.
C’est pourquoi Jésus nous invite, dès le début de sa vie publique, alors qu’aucune parole n’est encore sortie de sa bouche, à préparer notre coeur et notre esprit à le recevoir. Nous avons besoin de réapprendre à écouter. Pour que la Parole de Dieu puisse toucher les oreilles de notre coeur, nous avons besoin de réapprendre le silence, de retrouver la paix. Alors qu’il se prépare à nous annoncer la Bonne Nouvelle, Jésus nous prend par la main pour nous conduire au désert, dans l’intimité de notre chambre. Il veut nous parler coeur à coeur, loin des bruits de toutes sortes. Sommes-nous prêts à le suivre?
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