Quatrième Dimanche de Carême, Année C

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Jos 5, 10-12; 2 Cor 5, 17-21; Lc 15, 1-3. 11-32.

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Cette musique de la joie de Dieu, dont nous parle l’Evangile de ce quatrième dimanche de carême, ces chants de fête et ces danses, nous sommes nombreux, aujourd’hui encore, à ne pas vouloir les entendre et à nous en détourner.

Il y a d’abord ceux qui, comme le fils aîné de la parabole, se scandalisent de cette miséricorde d’un Dieu qui s’assied à la table des publicains et des pécheurs, et distribue si largement ses grâces. Qui, en effet, parmi nous, n’a, un jour, ressenti ce mouvement de jalousie et d’aigreur, qui a conduit le fils aîné à se mettre en colère et à se détourner d’un tel Dieu? Qui d’entre nous n’a un jour été scandalisé par cette prodigalité du Père, qui semblerait compter pour rien nos efforts?

Mais il y a aussi, à l’inverse, tous ceux qui se disent, et nous en sommes également, que de toute façon, tout se vaut, plus rien n’a vraiment d’importance, puisque Dieu pardonne tout! Pour ces derniers, la frontière entre le bien et le mal se trouve comme gommée, abolie. La miséricorde est devenue un prétexte pour se laisser aller. Tout est devenu relatif, dépendant de l’intérêt et du désir que l’on ressent.

Au fond, ces deux attitudes apparemment si contradictoires, se rejoignent, en fait, dans un même mépris, une même incompréhension. Alors que, pour les uns, la miséricorde est un objet de scandale, pour les autres elle devient un prétexte au relativisme, sous toutes ses formes.

C’est pourquoi cette parabole de l’enfant prodigue est riche d’enseignements, pour chacun d’entre nous, aujourd’hui encore, car elle nous dévoile tout autant notre propre visage que celui du Père. Le fils aîné, comme le fils prodigue ne symbolisent-ils pas, en effet, ces deux conceptions de l’existence, ces deux manières de se situer devant la vie, où, au fond, Dieu est le grand absent?

Le plus jeune se laisse aller à suivre la pente de ses instincts et de ses désirs. Il veut goûter tous les plaisirs de la vie, sans aucun frein. Pour cela, il a besoin d’argent, de beaucoup d’argent. Et, pour parvenir à ses fins, tout est bon. Il se débarasse de son père, comme s’il était déjà mort, et se jette dans les plaisirs. Et s’il revient, c’est d’abord par intérêt!

Le plus âgé, quant à lui, attend l’héritage, il guette la place. Il veut aussi profiter de la vie, mais autrement. Il attend son heure. Il se nourrit de rancoeurs et de frustrations. Il croit respecter son père, alors qu’il en a fait le prétexte de son refus de vivre.

Ainsi, dans les deux cas, dans les deux fils, nous retrouvons la même ambiguïté, le même refus. Pour tous les deux, ce qui compte, c’est leur propre désir, leur propre image. Ils sont enfermés en eux- mêmes, prisonniers de leur moi.

En leur tendant la main, en allant au devant de leur dégoût et de leur colère, le Père fait éclater cette fausse image qu’ils ont d’eux- mêmes, cet enfermement qui les ronge. La miséricorde de Dieu n’efface pas leur péché d’un coup de baguette magique, elle ne rend pas non plus leurs efforts inutiles, mais elle leur ouvre les yeux sur leur vocation d’hommes, appelés à devenir des êtres libres et responsables.

Car Dieu ne nous appelle pas à être des serviteurs, des esclaves soumis, mais Il nous appelle à devenir des fils, cohéritiers de la gloire de Son propre Fils, Jésus le Seigneur! Ce qu’Il attend de nous, c’est que nous prenions conscience de la grandeur de notre vocation, en contemplant Celui qui l’a vécue dans toute sa vérité, le Christ Jésus, notre Sauveur!

 

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