Premier dimanche de Carême, Année B

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Gen 9, 8-15; 1 P 3, 18-22; Mc 1, 12-15.
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Les lectures de ce jour reprennent deux puissants symboles, qui traversent toute l’Histoire Sainte, depuis les temps les plus reculés évoqués dans le livre de la Genèse, jusqu’aux jours du ministère de Jésus et aux temps de l’Eglise, tels que l’Evangéliste Saint Marc et l’Apôtre Saint Pierre nous les relatent. Il s’agit de l’eau et du désert.

« Jésus venait d’être baptisé; aussitôt l’Esprit le pousse au désert ». Ce bref passage de l’Evangile de Marc est comme un condensé de toute l’Histoire du Salut. En quelques mots, tout est dit de l’aventure de l’humanité, de l’histoire d’Israël, du salut en Jésus-Christ annoncé par l’Eglise, de notre propre aventure spirituelle. Ce passage par l’eau et par le feu, évoque en effet tant d’épisodes fondamentaux de cette incroyable rencontre de Dieu avec Son peuple, avec chacun d’entre nous.

Israël est mené à travers les eaux de la mer Rouge, pour être conduit au désert, durant quarante années. Lorsque Dieu veut séduire le coeur de son peuple, c’est bien au désert qu’il le ramène, à travers la prédication de ses prophètes. Et tant d’autres passages des Ecritures n’évoquent-ils pas, de manière poignante, les eaux de la mort et le fleuve de vie, le désert de l’épreuve et le temps des fiançailles?

Et sans doute n’est-ce pas sans raison qu’au seuil de ce carême, alors que nous venons tout juste d’entrer dans notre chemin vers Pâques, l’Eglise nous invite à méditer ce double mystère de l’eau et du désert, dans notre propre existence. Car, que nous le voulions ou non, un jour ou l’autre, nous sommes tous confrontés à cette double réalité, ce mystère de mort et de résurrection, de solitude et de communion.

Nous connaissons tous, en effet, ces moments où les flots semblent vouloir nous submerger et nous engloutir dans leur fureur. Mais nous savons aussi ces moments de grâce où Jésus, marchant sur les eaux, nous prend par la main, alors que nous allions sombrer. Nous avons tous fait l’expérience de ces longues traversées du désert, dans l’aride solitude, où chaque pas coûte infiniment, où chaque instant paraît une éternité. Mais nous avons tous expérimenté, un jour ou l’autre, qu’une source peut jaillir du rocher le plus dur, qu’un fleuve de vie peut se mettre à couler au plus improbable de nos déserts.

Cette histoire de mort et de vie, Jésus l’a traversée, comme l’ont fait tant d’hommes et de femmes avant lui, comme nous le faisons nous-mêmes, à notre tour, et comme le feront tant d’hommes et de femmes, jusqu’à la fin des temps. Mais Il l’a fait d’une manière particulière, unique, indépassable. En passant par les eaux du baptême, en traversant tous nos déserts, Jésus les a marqués de son empreinte. Désormais, nous n’y serons plus jamais seuls. Dans chacune de nos épreuves, dans chacun de nos déserts, nous pouvons désormais reconnaître la trace de ses pas, la marque de ses doigts, le reflet de son visage.

Ce passage, cette nouvelle naissance, cette Pâque nous sont nécessaires. Sans eux, nous ne pourrions naître à nous-mêmes. Sans eux, nous ne pourrions  devenir ce visage que Dieu a modelé, au plus intime de nous-mêmes, depuis les origines du monde. Si la chrysalide refusait de se perdre, jamais elle ne pourrait découvrir la grâce du papillon qui s’élève dans le ciel, jamais elle ne pourrait devenir ce pour quoi elle fut créée, de toute éternité.

 

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