Le travail

Le travail permet à la communauté de vivre du travail de ses mains . Une fromagerie est la principale ressource de la communauté. Outre ce travail de type industriel, il y a encore le Magasin et la vente de la Bière.  Mais il faut également assurer tous les services de la communauté : cuisine, entretien , lessive.

Mais quel est le sens du travail pour le moine du Mont des Cats ?

Le moine par cet humble travail est aussi appelé à donner son sens chrétien au travail. A l’époque du machinisme, le travail a souvent été présenté comme la manifestation de la puissance de l’homme. Marx définissait l’homme comme un « fabricant d’outil » et voyait en ceci sa « dignité ». 

Le sens du travail pour le moine va bien au-delà. Il est à comprendre à la lumière des intentions divines tels que nous pouvons les entrevoir dans le mystère de la création et de la rédemption.

L’homme est en effet appelé à compléter par son travail l’œuvre de la création que Dieu lui a confié.

Il est aussi appelé à participer à l’œuvre de la Rédemption. Les païens méprisait le travail et les travailleurs. A partir de la révélation, au contraire, le travail n’est plus compris, comme une pénible nécessité de fait, mais selon les intentions divines.

 

Il était déjà de règle chez les israélites, y compris chez les docteurs de la loi, que chacun travaille.

Le Christ en prenant la condition d’homme et en travaillant ne s’est pas seulement conformé à l’usage. Il a réellement « surnaturalisé », le travail et revêtu le travailleur d’une dignité nouvelle, lui permettant de pratiquer le commandement de la charité fraternelle.

Dans le Christ le travail du moine, aussi pénible ou humble fut-il, est ainsi associé à l’œuvre divine de la Rédemption. Le travail est pour lui un moyen d’entrer dans une intimité divine qui n’est pleinement vécu que dans le cœur à cœur du repos nocturne comme l’exprime avec tant de délicatesse cet extrait du Sermon 86 sur le Cantique des Cantiques de Saint Bernard

« Sur mon lit, au long des nuits, j’ai cherché celui que mon cœur aime »

2. … L’Épouse cherche donc l’Époux avec réserve, puisque c’est dans son lit, la nuit, mais c’est la réserve glorieuse, non pas celle qui couvre le péché. Elle le cherche pour purifier sa conscience et pour pouvoir se rendre ce témoignage : Ma gloire, c’est le témoignage de ma conscience1Dans mon petit lit, durant les nuits, j’ai cherché celui que mon cœur aime2. Remarquez qu’on nous fait connaître ici le lieu et le moment de cette pudeur. Une âme pudique n’aime rien tant que la solitude. Or la nuit et le lit en offrent la possibilité. Si nous voulons prier, on nous recommande de nous retirer dans notre chambre 3

afin que nous y soyons bien seuls. C’est une précau tion, car, si nous priions en public, la louange humaine pourrait nous dérober le fruit de la prière. …

3. Qui veut prier en paix ne tiendra pas seulement compte du lieu, mais du temps. Le moment du repos est le plus favorable et lorsque le sommeil nocturne établit partout un profond silence, l’oraison se fait plus libre et plus pure. Lève-toi la nuit, au commence­ment des vigiles, et épanche ton cœur comme de l’eau devant le Seigneur ton Dieu 4. Avec quelle sûreté la prière monte dans la nuit, quand Dieu seul en est témoin, et l’Ange qui la reçoit pour aller la présenter à l’autel céleste ! Elle est agréable et lumineuse, teinte du rouge de la pudeur. Elle est calme, paisible, lors qu’aucun bruit, aucun cri ne viennent l’interrompre. Elle est pure et sincère, quand la poussière des soucis terrestres ne peut la salir. Il n’y a pas de spectateur qui puisse l’exposer à la tentation par ses éloges ou ses flatteries. C’est pourquoi l’Épouse agit avec autant de sagesse que de pudeur lorsqu’elle choisit la soli tude nocturne de sa chambre pour prier, c’est-à-dire pour chercher le Verbe, car c’est tout un. Vous priez mal, si en priant vous cherchez autre chose que le Verbe, ou si vous ne demandez pas l’objet de votre prière par rapport au Verbe. Car tout est en lui : les remèdes à vos blessures, les secours dont vous avez besoin, l’amendement de vos défauts, la source de vos progrès, bref tout ce qu’un homme peut et doit souhaiter. Il n’y a aucune raison de demander au Verbe autre chose que lui-même, puisqu’il est toutes choses. Si nous paraissons demander, comme il est nécessaire, certains biens temporels, et si, comme nous le devons, nous les souhaitons par rapport au Verbe, c’est moins ces choses elles-mêmes que nous demandons, que celui qui est la cause de notre prière. Ils le savent bien, ceux qui ont pris l’habitude de n’user des biens temporels que pour mériter le Verbe.

Œuvres mystiques de Saint Bernard
Traduction Albert Béguin
Éditions du Seuil, Paris, 1953, réédité 1992.

1 2Co 1,12
2 Ct 3,1
3 Mt 6,6
4 Lm 2,19