Jubilé de profession de Frère Pierre

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Phil 3, 8-14 ; Lc 6, 12-19.
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Le passage de l’Evangile de Luc, que nous venons d’entendre, nous raconte le choix des douze Apôtres par Jésus, après une nuit passée dans le silence, sur la montagne, où le Seigneur s’était retiré pour prier. Puis, lorsque vient le jour, Jésus se met à appeler chacun d’entre eux, personnellement, un par un, par son nom. Cet appel est donc à la fois la consécration du chemin déjà parcouru par les disciples avec Jésus, mais il est aussi le début d’une nouvelle aventure, d’une plongée dans l’inconnu.

Cette double dimension d’un appel éminemment personnel et d’un départ pour une aventure sans retour, est le signe distinctif de toute vocation, quelle qu’elle soit. On pourrait dire que toute vocation humaine, aussi profane soit-elle, comporte ces caractéristiques. Mais ce qui lui donne une touche particulière, et qui en fait une vocation proprement chrétienne, c’est la personne qui adresse cet appel, et la prière qui l’accompagne.

En effet, la vocation chrétienne,  a fortiori la vocation monastique, est proprement un appel de Jésus, pour suivre Jésus, porté par la prière de Jésus. C’est même ce lien particulier, ce lien d’amitié avec Jésus, qui en est la caractéristique essentielle. On n’entre pas dans un monastère pour la communauté ou son Abbé,  ni même pour le style de vie ou le goût de la prière, mais on entre et on reste pour Jésus.

C’est bien cette découverte fondamentale qui anime le passage de l’Epître aux Philippiens, que nous avons entendu comme première lecture. Saint Paul ne cherche aucune autre explication à son aventure spirituelle. C’est parce que Jésus est au coeur de sa vie, que tout ce qu’il a vécu, tout ce qu’il a enduré, tout ce qui l’a fait souffrir et l’a rendu heureux, prend son sens. C’est parce que Jésus   est la lumière de sa vie, que tout ce qui n’est pas illuminé par cette présence perd toute valeur à ses yeux.

Dans ce chemin suivi par l’Apôtre Paul, cher Frère Pierre, tu as reconnu celui que le Seigneur t’a fait parcourir, tout au long de ces cinquante années. Comme Paul, tu as dû, toi aussi, quitter des personnes et des lieux auxquels tu t’étais attaché, avec ton coeur d’homme, pour aller là où tu étais envoyé. Comme l’Apôtre, tu as dû ressentir aussi, par moments, ces déchirements et cette solitude qui peu à peu façonnent le coeur de tout disciple de Jésus.

De ta famille, toutes ces communautés monastiques auxquelles tu as apporté ton aide et ta compétence, ton enthousiasme et ton courage, tu as aussi beaucoup reçu. Elles ont fait de toi, peu à peu, l’homme que tu es devenu aujourd’hui. Un homme qui, parce qu’il a consenti à cette vocation qui est la sienne, et parce qu’il a su dire « oui » même dans les situations les plus exigeantes et les plus difficiles, est devenu un homme libre.

Cher Frère Pierre, après ces cinquante années, je suis déjà ton troisième Abbé, sans compter les Abbesses des communautés de moniales où tu as vécu et travaillé. Et peut-être ne suis-je pas le dernier? Qu’importe! Mais je voudrais te remercier, en ce jour de ton jubilé, pour la confiance dont tu as su faire preuve, lorsque je t’ai demandé de rentrer au Mont des Cats en 1998, de prendre le magasin puis, il y a quelques semaines, d’assumer d’autres responsabilités. En choisissant ces lectures, tu nous as ouvert ton coeur, en nous offrant la clé de ta vie: Jésus, le Christ.

Qu’il en soit ainsi, pour toi, pour toujours, et pour chacun d’entre nous!

 

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