Dimanche des Rameaux

On est loin aujourd’hui de la solitude de la maison de Nazareth au jour où l’ange salua une jeune fille toute étonnée de cette visite. Aujourd’hui, c’est la foule autour de Jésus. On est d’ailleurs au centre du pays, Jérusalem, et c’est l’époque de la grande fête qui y ramène le peuple. Jésus y est accueilli, mais de manière très diverse. Nous-mêmes, comment le saluons-nous aujourd’hui ?
Quand Jésus arrive à Jérusalem, une grande foule, nous dit S. Jean, prit des branches de palmier et sortit à sa rencontre. Et on l’acclamait, on reconnaissait en lui un envoyé de Dieu, et même le ‘roi d’Israël’. Jésus ne fait pas taire les gens mais il pose un signe. Un âne passait par là : Jésus le prend et s’assit dessus. Jésus ne serait pas n’importe quel roi. Il serait celui dont parlait le prophète Zacharie, « un roi monté sur le petit d’une ânesse », un roi humble. On ne comprit pas.
Et au jour où il fut livré à Pilate, la foule – encore elle – réclama qu’on lui relâche un prisonnier, mais pas celui-là. Pas ce Jésus, roi des Juifs, pour qui elle n’a qu’un mot : « Crucifie-le ! »
Jésus ovationné à l’entrée de Jérusalem a-t-il été accueilli vraiment ? Accueilli de bouche, mais l’a-t-il été de cœur ?
Au début du récit de la passion selon S. Marc que nous venons d’entendre, Jésus est aussi accueilli mais d’une autre manière. Il était à table, et une femme entra avec un flacon d’albâtre contenant un parfum très pur. Elle brise le flacon et verse le parfum sur la tête de Jésus.
Certains s’indignent : ils voient l’argent, le précieux argent, plus de trois cents pièces d’argent,    ils le voient là    répandu, gaspillé, envolé, disparu… pour rien.
Pour rien ? Non, dit Jésus. Ce qu’elle a fait, elle l’a fait pour moi. Elle a d’ailleurs fait tout ce qu’elle pouvait faire, assure-t-il. Que pouvait-elle faire, cette femme, cette femme de rien, cette femme sans pouvoir, sans relation ? Elle ne pouvait rien pour la cause de Jésus. Mais elle a fait tout ce qu’elle pouvait pour Jésus lui-même. Elle lui a dit, elle lui a répandu tout ce qui remplissait son cœur, tout ce que Jésus y avait semé et qu’elle-même avait accueilli sans réserve, sans calcul, sans limite.
Jésus a été accueilli par elle, pleinement reconnu par elle, à quelques jours de sa passion. Un cœur humain vient à lui sans réserve et l’abrite à jamais. Il a où reposer sa tête.
Elle n’est pas la seule. A l’heure de sa mort sur la croix, d’autres femmes, Marie Madeleine et Marie mère de José demeurent là. Elles regardaient de loin, elles regardaient encore quand on descendit Jésus de la croix et le mît dans un tombeau.
Et S. Jean nous dit aussi comment Marie la mère de Jésus se tenait, elle, au pied de la croix, avec le disciple que Jésus aimait. Et quand on descendit le corps de la croix, Jésus n’est-il pas venu tout naturellement sur les genoux de sa mère, comme tant de « pietà » l’ont représenté ? Et le regard de Marie, s’il est alors plein de tristesse, n’est pas éteint. La vie que Jésus a semée en elle la tient dans l’espérance. Une espérance indicible, impossible. Mais elle sait depuis longtemps que rien n’est impossible à Dieu.
Marie, avec la femme de Béthanie, avec les autres Marie, avec S. Jean, et d’autres encore peut-être, Marie, contre toute espérance espère en Dieu. Elle a mis, elle met encore aujourd’hui en lui tout ce qui est sa vie, tout ce qu’elle est et qui n’a pas de prix. Dans cette terre accueillante, Jésus ressuscitera.

Père Abbé

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