Dimanche de l’Octave de Pâques

Les mots pour dire la résurrection de Jésus.

Lorsque nous lisons les Évangiles, chacun des quatre Évangiles, nous sommes frappés par le changement de style entre ce que les écrivains nous rapportent de la vie de Jésus jusqu’à sa mort et ce qu’ils expriment des apparitions de Jésus après sa résurrection.

Pour exprimer le mystère de l’Annonciation, les évangélistes se sont inspirés de textes similaires de la tradition biblique.   Dieu était apparu à Abraham pour lui annoncer la naissance prochaine d’Isaac.  Dieu était ensuite apparu à Moïse dans le buisson ardent puis sur le Mont Sinaï.  Les prophètes Élie et Élisée avaient fait des miracles et ressuscité des morts.  Dieu avait donné la Loi à Moïse sur la Montagne Sainte, Jésus proclama les Béatitudes sur une autre montagne.  Les « genres littéraires » élaborés et utilisés dans l’Ancien Testament, furent repris par les évangélistes pour décrire les prodiges et les signes que Jésus fit de son vivant.

Mais pour parler de la résurrection de Jésus et de ses apparitions aux disciples, il n’y avait pas de « modèles », il n’y avait pas d’antécédents.  Il fallut donc exprimer l’inexprimable avec des mots humains, avec des expressions nouvelles.  La découverte du tombeau vide était une expérience très particulière, tant pour les femmes au lever du jour (Mt 28,11-15) que pour Pierre et Jean qui accoururent pour vérifier leurs dires (Jn 20,3-10).  Le tombeau vide ne prouve rien, comme le rapporte Matthieu en expliquant que les grands prêtres donnèrent une forte somme d’argent aux soldats pour qu’ils disent que les disciples sont venus voler le corps tandis qu’ils dormaient (Mt 28,11-15).

Dans l’Évangile que nous venons d’entendre, Saint Jean essaye d’expliquer, comme il peut, que Jésus apparaît à ses disciples et leur adresse la parole.  Les portes étaient verrouillées, et tout à coup Jésus était au milieu de ses disciples.  Il leur montra ses mains et son côté…  Malgré ces précisions corporelles, il est évident pour Saint Jean que le Jésus qui apparaît n’est pas l’homme Jésus d’avant la passion.  Sa mort a fait passer Jésus en un autre état, et l’apparition aux disciples veut leur signifier qu’Il est toujours avec eux mais d’une autre manière.

Saint Marc, faisant allusion aux ‘Disciples d’Emmaüs’ écrit :
Il se manifesta sous un autre aspect à deux d’entre eux qui étaient en chemin. (Mc 16,12)

Saint Luc précise :
Jésus lui-même s’approcha, et il marchait avec eux.
Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. (Lc 24,15-16)

Saint Jean, lorsqu’il relate la pèche miraculeuse au bord du lac de Galilée, rappelle que Jésus n’est pas non plus reconnu par ses disciples :
Jésus leur dit : Venez, mangez. Et aucun des disciples n’osait lui demander :
Qui es-tu ? sachant que c’était le Seigneur. (Jn 21,12)

De même, lorsque Jésus apparaît à Marie-Madeleine en pleurs près du tombeau :
Elle aperçoit Jésus qui se tenait là, mais elle ne savait pas que c’était Jésus. (Jn 20,14)
Lorsqu’elle L’a reconnu, Jésus lui dit : Ne me retiens pas (Jn 20,17).

À Thomas Jésus dit : Avance ton doigt, vois mes mains.  Et Thomas, à la simple vue de Jésus proclame : Mon Seigneur et mon Dieu.  Tout cela montre que les Évangélistes essayent d’exprimer la nouveauté des apparitions de Jésus et le mystère de son état de ressuscité.

Lors d’une autre apparition décrite pas Saint Luc, Jésus dit aux disciples :
Rappelez-vous ce que je vous ai dit quand j’étais encore avec vous (cf Lc 24,44).

Cela signifie aussi que Jésus est à la fois « avec nous » et « plus avec nous ».

Les paroles que Jésus leur adresse ne concernent plus la vie ordinaire d’un groupe humain cheminant sur les routes de Galilée avec leur Maître :
Recevez l’Esprit Saint.
À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ;
à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus.

Et à Thomas huit jours plus tard :
Parce que tu m’as vu, tu crois.
Heureux ceux qui croient sans avoir vu.

La résurrection de Jésus a fortement bouleversé, déstabilisé les apôtres et les disciples.  Ils ont essayé de mettre des mots sur les événements qu’ils ont vécus, comme le rappelle Saint Jean à la fin de l’Évangile de ce matin,
pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu,
et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom.

C’est la foi que les premiers chrétiens ont confessée, c’est la foi que nous confessons, c’est la foi qui nous réunit ici en ce moment.  Que la participation à cette eucharistie, où Jésus ressuscité se donne en nourriture, augmente notre foi et nous donne de la vivre vraiment dans notre quotidien.

Frère Bernard-Marie

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