Saint Bernard, Solennité

La spiritualité de l’Amour de Dieu

D’après la tradition, Saint Bernard serait entré à l’abbaye de Cîteaux en 1113, il y a donc juste 900 ans.  À cette date, Cîteaux venait de faire une première fondation à La Ferté et l’arrivée de Bernard et ses 30 compagnons permit d’accélérer la deuxième fondation à Pontigny (1114).
Nos fondateurs, les Saints Robert, Albéric et Étienne, avaient eu à cœur de réaliser la fondation du Nouveau Monastère et de lui donner une bonne assise, au plan de la vie monastique et de la forme juridique.  C’est dans ce but que Saint Étienne rédigea la Charte de Charité pour définir les liens qui existeraient entre les maisons issues de Cîteaux.  Aucun de nos trois Fondateurs n’eut le loisir de laisser à la postérité des sermons et autres enseignements spirituels donnés à leur communauté.
Dieu a appelé Bernard à entrer à Cîteaux pour compléter la fondation de la nouvelle famille monastique avec un enseignement spirituel particulier.  Bernard avait été un enfant doué auquel ses parents donnèrent la possibilité de poursuivre ses études à l’école canoniale de Châtillon-sur-Seine.  Il y acquiert une bonne connaissance de la Bible, des Pères de l’Église et des principaux auteurs latins, ce qui fait de lui un parfait représentant des lettrés de son temps.  De par ses origines Bernard connaissait également la culture de son temps et en particulier les chants d’amour courtois que les troubadours venaient proclamer dans les fêtes du château.
Au début de sa vie monastique, Bernard unifia toutes ses connaissances et qui nourrirent sa lectio divina.  Une fois devenu abbé de Clairvaux, Bernard put faire partager par ses frères ses méditations.  C’est ce que Saint Bernard exprime dans la préface de sa toute première œuvre éditée, le Traité de l’Humilité et de l’Orgueil :
Tu m’as prié, Geoffroi mon frère, de t’exposer dans un traité plus complet ce que j’avais dit des degrés d’humilité devant les frères.  Voulant donc satisfaire dignement à cette demande…
Après l’excellent accueil que reçut cette première œuvre de l’abbé de Clairvaux, Bernard se mit à rédiger d’autres textes en vue de leur publication.  Que ses Sermons sur le Cantique des Cantiques aient été prononcés, c’est probable.  Qu’ils aient été réécrits pour être publiés, c’est évident.  Lorsqu’il se met à commenter le Livre du Cantique des cantiques, qui commence par cette phrase : Qu’il me baise d’un baiser de sa bouche… Bernard commente ainsi :
Il n’appartient pas à tout le monde de le dire ainsi, mais celui-là seul peut le faire, qui a reçu une fois un baiser spirituel de la bouche de Jésus-Christ… (S.Ct 3,1)
Bernard se dépasse lui-même et fait une synthèse grandiose de l’amour courtois et de son amour de Dieu.  Deux autres Livres de Bernard qui furent réédités et traduits à de nombreuses reprises jusqu’à aujourd’hui, ce sont le Traité de l’Amour de Dieu et le ‘Missus Est’ ou les Louanges de la Vierge Mère.
Voici la définition de l’amour de Dieu telle qu’il la propose au début de son Traité :
Vous voulez apprendre de moi pour quel motif et dans quelle mesure il faut aimer Dieu ?  Eh bien, je vous dirai que le motif de notre amour pour Dieu, c’est Dieu lui-même, et que la mesure de cet amour, c’est d’aimer sans mesure. (Dil I,1)
Saint Bernard par ces textes et quantité d’autres a marqué durablement la spiritualité cistercienne.  Il a eu des successeurs, déjà de son vivant, avec par exemple les Bienheureux Guillaume de Saint Thierry, Guerric d’Igny et Aelred de Rievaulx.  Gilbert de Hoyland, ami d’Aelred et anglais comme lui, a continué les Sermons sur le Cantique là où Bernard les avait arrêtés.  Il ne se sentait pas digne de commenter à nouveau les versets que Bernard avait traités.
Telle est la participation de Bernard dans la tradition cistercienne.  Elle fut maintenue voire reprise au long des siècles et jusqu’à aujourd’hui par nombre d’auteurs cisterciens et trappistes.  C’est cette même recherche de l’amour du Christ qui animait les auteurs trappistes du XXème siècle.  Rappelons-nous ces abbés qui transmirent leur expérience spirituelle dans des livres dont les titres sont évocateurs :
L’âme de tout apostolat (Dom Jean-Baptiste Chautard), Seigneur apprends-nous à prier, L’amour seul suffirait (Dom André Louf), Le bonheur en Dieu (Dom Marie-Gérard Dubois), et tant d’autres.
Cette spiritualité de l’amour de Dieu, Bernard aujourd’hui nous invite à y adhérer nous-mêmes, à la chercher activement.  Demandons à Jésus, dans cette Eucharistie de fête, de pouvoir, nous aussi un jour, expérimenter la « visite du verbe » (S.Ct. 74) dans notre cœur.

Frère Bernard-Marie

Ce contenu a été publié dans Homélies 2013. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.