Troisième Dimanche de Pâques, Année C

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Act 5, 27-41; Ap 5, 11-14; Jn 21, 1-19.

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« C’est mon choix »! Cette petite phrase, qui exprime de façon concentrée la philosophie de la vie de bon nombre de nos contemporains, s’applique très bien à une journée d’élection, comme celle d’aujourd’hui. Pourtant, elle est très éloignée, pour ne pas dire complètement à l’opposé, de ce que nous disent les lectures de ce jour. La foi des disciples, en effet, n’est pas présentée comme un choix, mais comme une expérience et comme un témoignage. Et la finale de l’Evangile souligne d’ailleurs avec force ce paradoxe: « c’est un autre qui te mettra ta ceinture, pour t’emmener là où tu ne voudrais pas aller »!

Nous sommes sans doute là au coeur du problème du Christianisme, à notre époque, dans le monde contemporain. Même s’il ne s’exprime pas toujours de cette manière, le conflit qui provoque le rejet de la foi, la prise de distance vis à vis de l’Eglise, par bon nombre de gens aujourd’hui, oppose une certaine conception de la liberté résumée par cette petite phrase: « c’est mon choix », avec cette autre manière de comprendre la liberté, comme elle nous est présentée dans les lectures de ce jour.

Et, paradoxalement, c’est l’expérience de la Résurrection qui est au coeur de cette confrontation. En effet, pour les disciples, revenus à leurs affaires, la Résurrection de Jésus est d’abord un événement qui bouscule et renverse toutes leurs catégories, et vient déranger leur liberté. Pour eux aussi, cette expérience ne fut pas facile. On les voit hésiter, douter, être saisis par la crainte et l’incertitude. Au fond, les réactions de Pierre et des autres sont très proches de ce que nous vivons nous-mêmes. La Résurrection vient remettre en cause une certaine manière de vivre, notre place dans la société, notre appartenance à tel groupe ou tel milieu social.

Car l’expérience de la Résurrection se transforme très vite, pour les Apôtres, en appel à la mission. Ce qu’ils ont vu, ce qu’ils ont entendu, ils doivent en témoigner. Les lectures des Actes des Apôtres ou de l’Apocalypse insistent bien sur cette réalité. Dans les Actes, Pierre insiste sur cette rupture qu’est devenue pour lui la Résurrection. Il se doit désormais d’obéir à Dieu, de sortir du conformisme ambiant, des manières de vivre et de penser communes à son époque, pour témoigner de ce qu’il a vu. De même, Saint Jean dans l’Apocalypse, insiste sur ce qu’il a entendu et vu personnellement. Leur problème, à tous les deux, c’est d’oser témoigner.

Et le défi rencontré par les premiers disciples de Jésus, demeure toujours le nôtre, aujourd’hui encore. Il est plus facile, plus prudent, de se conformer à l’ambiance du monde qui nous entoure, de penser et de faire comme tout le monde. Notre époque aime les originalités, même les plus débridées, mais à condition qu’elles soient bien cadrées et domestiquées. Il suffit de sortir de ce cadre, de témoigner de sa foi, pour sentir des regards de désapprobation et parfois de haine. La foi n’est pas plus facile aujourd’hui que du temps des premiers disciples de Jésus.

C’est pourquoi les lectures de ce jour, comme d’ailleurs tous les récits du Nouveau Testament, qui nous décrivent la première communauté chrétienne, sont pour nous une merveilleuse école de discernement et de courage. Foi ne rime ni avec facilité, ni avec fanatisme. Il s’agit, tout au contraire, d’un lent processus de transformation et de libération. Car il faut être devenu libre, profondément libre, pour pouvoir témoigner de sa foi, sans violence mais aussi sans peur, sans honte mais aussi sans orgueil, comme le fait l’Apôtre Pierre, dans le livre des Actes.

Le chemin du témoignage est d’abord un chemin de conversion, à l’opposé de tous ceux qui prétendent faire la leçon aux autres, sans changer eux-mêmes. La foi au Christ Ressuscité est d’abord une vie qui rayonne parce qu’elle se laisse transformer. Elle est un amour qui finit par transfigurer tous ceux qui en ont été saisis!

 

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