Neuvième Dimanche du T.O., Année A

+
Dt 11, 18-32; Rom 3, 21-28; Mt 7, 21-27.
+
Que les belles paroles ne suffisent pas pour entrer dans le Royaume des cieux, nous pouvons aisément le comprendre, lorsque nous reviennent à la mémoire les invectives de Jésus à l’encontre des pharisiens « qui disent et ne font pas »! Mais que cette restriction puisse concerner également les « prophètes », ceux qui ont « chassé les démons » et même « fait beaucoup de miracles » au nom de Jésus, voilà qui ne peut que nous surprendre, nous laisser sans voix!
Ainsi, toutes les merveilles que nous pourrions dire, tous les prodiges que nous pourrions accomplir, ne peuvent guère, aux yeux de Jésus, combler cette distance qui se creuse, dans nos vies, entre la Parole de Dieu et notre être profond. Et il va même plus loin en affirmant, au risque de nous scandaliser, que tous les miracles que nous pourrions accomplir ne serviraient à rien, si notre coeur ne s’est pas converti. Car ce qui compte vraiment, pour Jésus, c’est la conversion de notre propre coeur!
Jésus nous provoque donc, dans l’évangile de ce jour, à vivre une véritable révolution copernicienne, une révolution toujours d’actualité. Le règne de Dieu commence au dedans de nous. Il commence là où s’arrête le regard que les autres peuvent poser sur nous, sur nos paroles et nos actes. Le véritable enjeu de l’évangile ne se trouve donc pas dans nos activités sociales, caritatives ou spirituelles, aussi bonnes soient-elles, mais bien là où commence notre propre désert intérieur, ce lieu où nul ne peut pénétrer, ce lieu où nous demeurons seuls avec nous-mêmes, sous le regard de Dieu.
Jésus en parle, de manière imagée, dans la parabole des deux maisons bâties sur le roc ou sur le sable. En apparence, toutes deux sont semblables. Rien ne les différencie aux regards du passant. On pourrait même imaginer que la villa au bord de la mer a sans doute plus d’allure et plus d’attrait que ce chalet accroché aux flancs de la montagne. Toutes deux semblent pouvoir offrir un abri rassurant à celui qui cherche à reprendre des forces. Et la première paraîtra sans doute plus facile d’accès et plus accueillante que la seconde.
Et pourtant, dans le tourbillon de l’existence, au coeur des tempêtes et des déluges qui peuvent submerger notre existence, l’une se révèlera solide et sûre, tandis que l’autre sera emportée comme la paille dans le vent. En insistant sur les fondations, sur les fondements, qui, par définition, ne se voient pas, Jésus nous renvoie donc à notre propre aventure intérieure, celle qui se déroule loin des apparences et des regards trompeurs. Et Saint Paul, dans le passage de l’Epître aux Romains, que nous venons d’entendre, y revient de façon encore plus insistante, en nous rappelant que nous sommes tous pécheurs, et que c’est la foi en Jésus-Christ qui nous sauve, qui nous rend solides, qui nous fonde.
En nous ramenant ainsi dans le secret de notre coeur, la Parole de Dieu nous rappelle que la foi chrétienne est d’abord une histoire éminemment personnelle, une aventure qui concerne les entrailles de notre coeur. C’est là, dans le secret, que se noue notre véritable destinée. Par delà les apparences, en deçà de tout ce que nous pourrions accomplir, il y a ce mystère insondable de notre être profond, cet « homme intérieur » dont Saint Paul affirmera qu’il se fortifie, alors même que notre être extérieur s’en va en ruines.
Il ne s’agit pas, comprenons-nous bien, d’une invitation à négliger la parole et l’action, mais de remettre notre vie chrétienne en ordre, dans sa véritable perspective. C’est Jésus qui nous sauve, c’est lui qui donne à nos paroles et nos oeuvres leur véritable efficacité. Sans lui, nos paroles ne sont qu’un souffle emporté par le vent. Sans lui, nos actions passeront comme la fleur des champs.
Sans lui, tout n’est rien. Tout dépend donc de notre relation avec lui, au plus intime de nous-mêmes.
Ce contenu a été publié dans Homélies 2008. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.