Troisième Dimanche de l’Avent

La fin de cet Evangile nous porte vers l’avenir : « Lui vous baptisera ». Elle rejoint ainsi l’oracle d’Isaïe entendu en 1ère lecture : « Un rameau sortira de la souche de Jessé ». Oracle qui culmine dans l’affirmation radicale : « la connaissance du Seigneur remplira le pays comme les eaux recouvrent le fond de la mer ».

 

Dans le présent, les signes sont plutôt inverses. Le Dieu chrétien s’est fort estompé. Il y a un demi-siècle, beaucoup de manifestations religieuses le rendaient très présent dans la société et elles pouvaient faire penser qu’un jour, « la connaissance du Seigneur remplirait le pays », qu’elle animerait tous les rouages de nos villes et de nos campagnes. On en est loin aujourd’hui.

 

Mais, même par le passé, l’ensemble du tableau dressé par Isaïe n’était pas vraiment réalisé. Hier comme aujourd’hui, aucune évidence de ce que « le loup ait habité avec l’agneau, que le léopard se soit couché près du chevreau, que le veau et le lionceau aient été nourris ensemble, que la vache et l’ourse aient eu même pâturage ». Nous étions ­ et sommes encore ­ des loups rapaces : l’homme loup pour l’homme. Alors qu’en est-il de cette connaissance du Seigneur qui remplirait l’univers comme les eaux recouvrent le fond de la mer » ?

 

Certains ont connu le Seigneur. Du moins par leurs ancêtres. Ceux auxquels s’en prend si vertement Jean-Baptiste : « Engeance de vipères ! » Eux connaissent Dieu, le Dieu de leur père Abraham : « Nous avons Abraham pour père ». Cette référence est toute leur religion, semble-t-il ; elle ne leur donne pas plus vie qu’à des pierres ; elle ne produit pas de fruit. Mais alors, qu’en sera-t-il de l’oracle de leur prophète Isaïe, de cette « connaissance du Seigneur qui remplira le pays comme les eaux recouvrent le fond de la mer » ?

 

Cette connaissance, un autre prophète, Jérémie (venant bien après Isaïe), l’a aussi annoncée. Elle viendra non des patriarches ni de l’alliance première de Dieu avec Moïse et son peuple. Elle viendra, dit Jérémie, d’une alliance nouvelle. Alors, « ils n’auront plus besoin d’instruire chacun son compagnon, ni chacun son frère en disant : « Apprends à connaître le Seigneur ! » Car tous me connaîtront  des plus petits jusqu’aux plus grands, déclare le Seigneur » (Jr 31). Alors, oui, « la connaissance du Seigneur remplira le pays, comme les eaux recouvrent le fond de la mer ».

 

Qu’a-t-elle donc de particulier, cette Alliance nouvelle ? Le prophète Jérémie en a eu la révélation. Il continue en effet : « Le Seigneur déclare : Je pardonnerai leurs fautes, je ne rappellerai plus leurs péchés ». Ce pardon, pour devenir effectif, ne pouvait trouver qu’une seule voie. C’est d’être prononcé par Dieu mais dans des mots humains, dans une chair humaine, dans un être humain qui connaisse la souffrance, les accusations, la médisance, la calomnie… Un être dans l’épreuve tout comme tant d’entre nous. Et c’est dans sa chair et par sa chair qu’il a établi cette alliance nouvelle et définitive, cette victoire irrévocable, cette lumière inextinguible : il a pardonné tout ce qu’il a subi, il a aimé les siens par-delà tout ce qu’ils lui ont fait subir. Il les a aimés non seulement jusqu’au bout de sa vie, mais jusqu’au bout de son être : il leur a dit, et par là, nous dit à tous, une fois pour toutes, son accueil libre et total, sa bienveillance sans limites, son espérance inaltérable en nous.

 

Alors, oui, « la connaissance du Seigneur remplira l’univers comme les eaux recouvrent le fond de la mer ». « Le loup habitera avec l’agneau ». Tous, « d’un même cœur, d’une même voix, comme dit S. Paul, rendront gloire à Dieu le Père de Notre Seigneur Jésus-Christ ».

 

Ce contenu a été publié dans Homélies 2010. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.