Sixième Dimanche du T.O.

Il a été dit aux anciens – Moi je vous dis.
Selon la tradition rabbinique rapportée dans le traité des Pères (Pirke Avot), Moïse écrivit toute la Torah (les Livres du Pentateuque) de sa propre main et il remit un exemplaire du Sefer Torah à chacune des Tribus d’Israël. Un autre Sefer Torah fut conservé dans l’Arche Sainte. Quant à la Loi orale, elle fut enseignée verbalement aux sages. Elle fut transmise de maître à disciple, et ce pendant des siècles, jusqu’à aujourd’hui.
À l’époque de Jésus, cette Loi orale était transmise par les grands maîtres que furent Shamaï et Hillel ; puis par Rabban Gamaliel l’ancien, aux pieds duquel Paul se laissa instruire (Ac 22,3). À Gamaliel succéda son fils Rabbi Shimon ben Gamliel et après lui enseigna Rabban Yohanan ben Zakkaï à l’époque de la destruction du Temple de Jérusalem en l’an 70. Ces maîtres du Judaïsme sont les premiers auteurs de ce que l’on appelle la Mishna.
La tradition du temps de Jésus se transmettait donc de maître à disciple, et chacun se devait de donner ses sources, si l’on peut parler ainsi. C’est dans ce type d’enseignement que Jésus se place dans l’évangile que nous venons d’entendre. Il nous rappelle à plusieurs reprises :
Vous avez appris qu’il a été dit aux anciens…
Ensuite, Jésus ne précise pas les dires des anciens, il n’entre nullement dans une casuistique. Il n’y a pas de cas à traiter, pas de conditions à appliquer, pas de procédure à respecter. Non, Jésus d’emblée se situe à un autre niveau. À chaque fois Il introduit sa réponse par la phrase :
Eh bien moi, je vous dis.
Rappelons-nous encore que le discours sur la montagne se situe au tout début de la vie publique de Jésus. Dès le commencement de sa mission, Jésus se situe différemment que ses coreligionnaires. Il ne s’est pas mis à l’école de l’un des grands rabbins de son temps. Il ne transmet pas un enseignement reçu d’eux ni inspiré d’eux.
Non, Jésus se situe d’emblée comme Moïse. Plus grand que Moïse même ! Car Moïse parlait au nom du Seigneur et transmettait au Peuple ce que Dieu lui avait fait voir sur la Montagne Sainte. Jésus, Lui, parle en son propre nom ! Il a vu, certainement, mais pas sur la Montagne Sainte, directement dans la Cité céleste. Voilà toute la différence. Et Jésus, tout au long de sa vie publique continuera à enseigner ce qu’Il a appris du Père. Ses auditeurs et ses détracteurs ne s’y trompèrent pas.
Combien de fois les auditeurs émerveillés ne dirent-ils pas :
Il parle avec autorité et non comme les scribes. (Mt 7,29)
D’autres furent choqués et s’exclamèrent :
D’où lui vient cette sagesse ? N’est-il pas le fils du charpentier ?(Mt 13,54)
Enfin, lorsque les Pharisiens l’interpellèrent alors qu’Il enseignait dans le Temple, ils lui demandèrent :
De quelle autorité fais-tu cela, ou qui t’a donné cette autorité ?(Mt 21,23)
Jésus ne répond jamais à ces questions. Son origine divine ne se voit qu’avec les yeux de la foi, inutile alors de se justifier. De plus, l’enseignement qu’Il donnait parlait de lui-même. Parlant plus fort que Moïse, Jésus savait Qui lui en donnait le pouvoir… C’est pourquoi, dans l’Évangile de ce matin, Jésus insiste lourdement sur l’autorité qui est la sienne :
Ne pensez pas que je suis venu abolir la Loi ou les Prophètes :
je ne suis pas venu abolir, mais accomplir.
Et plus loin :
Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens,
vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux.
Cela explique également la fermeté avec laquelle Jésus nous invite ce matin à être sincères dans nos dires et nos pensées, à l’exemple de son Père du Ciel :
Que votre « oui » soit « oui », que votre « non » soit « non »,
Tout le reste vient du démon.
Que la participation à cette Eucharistie nous donne de vivre en toute vérité notre relation à Dieu, à Jésus, et d’en témoigner dans nos comportements dans notre vie quotidienne. Que notre « oui » soit « oui », que notre « non » soit « non »…
Frère Bernard-Marie
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